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9 avril 2023 - Résurrection du Seigneur

Résurrection du Seigneur
Dimanche de Pâques
9 avril 2023 

Chers frères et sœurs, 

Dans toutes les églises chrétiennes du monde a retenti cette nuit le chant de l’Alléluia. La lumière a resplendi et nous avons acclamé le Christ ressuscité, lumière du monde. Les catéchumènes ont été plongés dans la source de la vie : ils sont nés à la vie nouvelle, et nous les avons accueillis avec joie dans notre Église en communiant avec eux au Corps du Christ, le Pain de la Vie. Et nous aimons nous saluer aujourd’hui en disant : « Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité. » La foi des Apôtres est venue jusqu’à nous par une transmission ininterrompue au long des siècles. Les témoins qui ont vu et entendu Jésus, et qui ont découvert le tombeau vide au matin de Pâques nous ont partagé le trésor de la foi. Cette longue transmission qu’on appelle la Tradition n’est pas un trésor que l’on garde dans les belles vitrines d’un musée. « Dieu nous a chargés d’annoncer au peuple et de témoigner » dit l’apôtre Pierre dans son discours chez le centurion à Césarée, reprenant en quelque sorte le verset du psaume 117 : « je ne mourrai pas, je vivrai, pour annoncer les actions du Seigneur ». Nous comprenons bien dans ces paroles que le chrétien n’est pas statique, figé. Il n’attend pas les bras croisés que le temps passe. Il est appelé à entrer dans une grande dynamique, celle de la transmission, celle de l’annonce. Observons ce mouvement : dans la très belle page de l’Évangile selon saint Jean, nous venons d’entendre comment Marie-Madeleine se rend au tombeau « de grand matin. C’était encore les ténèbres ». Elle n’a pas tardé à se lever. Elle y va avec empressement pour achever les rites funéraires. Il fait encore nuit. Elle découvre le tombeau ouvert. Aussitôt, sans se faire des nœuds au cerveau, elle fait le chemin en sens inverse et en courant, pour aller dire à Pierre : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé ».  Cette annonce provoque le départ immédiat de Simon-Pierre avec Jean. Ils courent tous les deux, chacun à son rythme ; Jean arrive le premier. Il attend Pierre. Pierre entre, il voit. Jean entre. « Il vit et il crut ». On retrouve cet empressement, cette dynamique dans le récit des disciples d’Emmaüs qui est lu à la messe de ce soir : autant ils trainent les pieds en quittant Jérusalem, plongés dans la tristesse et l’incompréhension, autant, dès que « leurs yeux s’ouvrirent » et qu’ils « le reconnurent », ils se précipitèrent à Jérusalem et « racontaient ce qui s’était passé sur la route et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain ». 

Cet élan doit devenir le nôtre. L’évêque que je suis n’est pas un gardien de musée. Je suis bien humblement un successeur des apôtres dont la mission première est l’annonce de l’Évangile. En ce saint jour de Pâques où nous célébrons le cœur de notre foi, il me revient de vous aider à vous réveiller, à vous remettre debout, à ressusciter, et à vous lancer dans la Mission. Reconnaissons-le : nous sommes souvent, parfois, des chrétiens fatigués, un peu raplapla, ralentis. On dirait même parfois que nous n’y croyons pas beaucoup.  Nous restons installés dans la routine, les habitudes. Nous faisons vivre des paroisses de plus en plus exangues. D’aucuns, parfois même dans le clergé, semblent résignés. A quoi bon se défoncer ! Nous observons le déclin de l’Église catholique en Occident : vocations, enfants catéchisés, nombre de baptêmes d’enfants, de mariages, d’obsèques religieuses. Et pourtant quelques jeunes, comme Jean, courent plus vite que nous et nous invitent à renaître, à nous laisser revigorer. J’en veux pour preuve le groupe de 40 à 50 jeunes que j’accompagnerai avec joie à Lisbonne aux JMJ.  

Oui, frères et sœurs, « si le Christ n’est pas ressuscité, alors notre foi est vaine, elle ne sert à rien », nous dit saint Paul. Mais « Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois du supplice, Dieu l’a ressuscité le troisième jour. Il lui a donné de se manifester, non pas à tout le peuple, mais à des témoins que Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts. » nous dit saint Pierre. Alors, avec Marie-Madeleine, avec Simon-Pierre, avec Jean le disciple que Jésus aimait, avec les disciples d’Emmaüs, allons-y avec empressement. Le monde ne nous attend pas mais nos contemporains ont soif de la Bonne Nouvelle, je le crois. Vous le savez, j’essaie d’être un « prophète de l’espérance ». Saint Jean-Paul II définissait ainsi le ministère de l’évêque. Et dans le projet missionnaire diocésain, j’ai mis l’expression au pluriel. Nous sommes tous appelés à être ensemble des « prophètes de l’espérance ». Mardi lors de la messe chrismale, je posais cette question pour rappeler la demande du Pape de nous engager dans la conversion pastorale et missionnaire : « Église de Châlons, où en es-tu ? Église de Châlons, qu’as-tu accepté de changer ? Église de Châlons, es-tu « en attitude de sortie » ou restes-tu cantonnée dans l’entre-soi et l’auto-préservation ? ». On pourrait rajouter en interrogeant chacun : es-tu assis ou debout ? à l’arrêt ou en mouvement ? endormi ou réveillé ? Crois-tu aux réalités du Ciel ou seulement à celles de la terre ? Crois-tu que Jésus est ressuscité ? Crois-tu que le Seigneur, par la force de son Esprit, nous rend vainqueur de nos épreuves ? Quel est ton engagement concret pour annoncer l’Évangile par la parole ou par les actes ? Veux-tu bien te lever ? Acceptes-tu de bouger ? 

La dynamique des femmes de Jérusalem, « apôtres des apôtres », et celle des disciples de Jésus nous provoque aujourd’hui. Un réveil est nécessaire et urgent. Ne nous laissons pas bercer par les sirènes du temps qui nous endorment et nous empêchent de réagir. Il faudrait maintenant déboulonner les statues religieuses, la laïcité servant de prétexte pour déchristianiser notre société, et le législateur prépare la légalisation de l’euthanasie ! Regardons autour de nous et entendons les appels : les tensions sociales nous invitent au dialogue et à une vraie solidarité. Les conflits et les guerres nous demandent un véritable effort pour construire la paix là où nous sommes, avec nos voisins immédiats. Les pressions mortifères sur l’opinion et les atteintes à la dignité de la personne humaine exigent que nous nous levions pour dire un grand « Oui à la vie ». La sécularisation nous pousse à témoigner. La sécheresse spirituelle nous fait voir la nécessité vitale de l’Eucharistie. L’indifférence nous entraine à affirmer notre foi.  

En ce saint jour de Pâques, retrouvons la foi de notre Baptême. Plongeons-nous à nouveau dans la source vive. « recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. » dit saint Paul. Laissons-nous entrainer par les 20 néophytes de cette nuit, les 50 adultes qui recevront la Confirmation le Dimanche de Pentecôte, les 30000 JMJistes français. Ils courent, ils vont de l’avant. Ne tardons pas. Levons-nous ! Renaissons ! Ressuscitons ! Allons, nous aussi, à la rencontre du Seigneur. Il est ressuscité, il est saint, il est grand, son Amour remplit nos cœurs de joie et de paix. Sa lumière nous éclaire. Il est le Seigneur éternellement. Et chantons dans nos cœurs : « Je suis dans la joie, une joie immense, je suis dans l’allégresse, car mon Dieu m’a libéré ». 

Amen. Alleluia