Homélie de Père ROYER


Homélie du 21e dimanche du temps ordinaire  à Sézanne (21/08/2022)

Un évangile difficile à commenter.

Au cours de mon ministère, on m’a rarement posé la question

« N’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ». Elle n’est pas dans les préoccupations de nos

contemporains, du moins sous cette forme.

Comme souvent, Jésus ne répond pas à la question, il ouvre le débat.

Malgré le décalage avec notre mentalité présente, la question peut m’interpeler. Elle porte

sur « peu de gens« , elle a un côté restrictif en nombre, mais aussi restrictif dans le domaine

envisagé : le salut.

Notre société et nous-mêmes risquons d’être polarisés par les chiffres.

Combien de personnes, de jeunes à la messe du dimanche ? Combien de pèlerins à Lourdes,

combien d’enfants au KT et de personnes pour les accompagner.

Les chiffres peuvent être signes d’inquiétude, et cause de découragement.

 

En réponse à la question, Jésus imagine tout un dialogue où la porte tient une grande place.

Je rappelle :

Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite.

Beaucoup chercheront à entrer (et n’y parviendront pas)

Le maître se lèvera pour fermer la porte

Vous vous mettrez à frapper à la porte, disant « Seigneur, ouvre-nous ».

Cette insistance met le doigt sur un enjeu important de notre vie, nous sentons tous que notre vie

présente a quelque chose de provisoire et d’inachevé, et qu’il nous faut atteindre un ailleurs, dont

le maître de maison détient le secret, et la clef, puisqu’il s’agit d’une porte à franchir.

Cet ailleurs au-delà de la porte, nous le désignons sous des noms divers : le ciel, la vie éternelle,

le texte avant la communion nous familiarise avec l’expression : Heureux les invités au repas des

noces de l’Agneau.

Nous ne pouvons l’exprimer que par des images, insuffisantes pour nous donner une certitude,

mais suffisantes pour stimuler notre désir, comme on entrevoit l’intérieur d’un château à travers

la fente d’une porte. Notre confiance en Jésus, est suffisamment structurée pour prendre au

sérieux son interpellation

Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas.

Il ne faudrait pas en conclure que le maître de maison veut nous décourager et limiter le nombre

des entrants. Il veut plutôt que nous prenions au sérieux l’enjeu de notre vie présente, qui est le

temps d’apprentissage de la vie éternelle.

Ce que nous rappelle à sa manière la lettre aux Hébreux.

Mon fils, ne néglige pas les leçons du Seigneur ;

Ne te décourage pas quand il te fait des reproches.

Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ; il corrige tous ceux qu’il accueille

comme ses fils.

Plus tard, quand on s’est repris grâce à la leçon, celle-ci produit un fruit de paix et de justice.

À une relecture du texte, j’ai constaté que la lettre aux Hébreux utilisait 6 fois l’expression

donner des leçons, auxquelles il faut ajouter le mot reproches et corriger.

On est à contre-courant de la mentalité actuelle, sauf si on traduit la vie nous enseigne sans cesse

« un chemin de vie ». À nous d’y être attentifs, et de ne pas vivre dans la distraction permanente car

les rencontres, les évènements, les paroles entendues au quotidien sont autant d’appels à laisser

Dieu nous remodeler, nous ajuster à son amour. Ça ne se fait pas toujours en douceur !

Dans l’évangile il y a un passage qui s’adresse particulièrement à nous pratiquants fidèles,

y compris au prêtre qui parle aujourd’hui. La suite du dialogue imaginé par Jésus.

Le maître dit : Je ne sais pas d’où vous êtes.

Notre réponse : Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.

Le maître reprend les mêmes mots : Je ne sais pas d’où vous êtes.

Je ne pense pas qu’il faut en conclure que ce sont les absents qui ont raison et que notre présence à l’eucharistie, et notre méditation des écritures n’ont pour seul effet de nous condamner aux yeux de

Dieu. « Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice. »

Cette histoire inventée par Jésus, est un appel particulier à rechercher sans cesse la cohérence entre

notre foi et nos actes. À ce niveau il nous faut être humbles, conscients de nos limites, mais remplis d’espérance. La lettre aux Hébreux nous dit bien que les exigences de Jésus ont pour but de redresser

nos mains inertes et nos genoux qui fléchissent, de rendre droits nos pieds sur des chemins tortueux en

fait de nous guérir. 

Que dire en conclusion ?

Jésus constate que beaucoup de ses contemporains sont passés à côté du moment providentiel

qui se déroulait sous leurs yeux.

Nous pouvons faire le même constat autour de nous, en gros la religion est considérée comme

une perte de temps, une préoccupation inutile et parfois même dangereuse pour le bon

fonctionnement de la société, la foi en Dieu comme une aliénation.

À nous de retenir la conclusion positive de Jésus lui-même.

On viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume

de Dieu.

 

Homélie de la fête de l’Assomption 15/08/2022  à Villiers aux Corneilles

Chez les catholiques et les orthodoxes, la piété mariale tient une grande place.

Le calendrier fait place à de nombreuses fêtes, dont l’Assomption est la plus solennisée en France.

  • On ne compte pas les lieux de pèlerinages. La France est bien fournie avec la chapelle de la
  • rue du
  • Bac à Paris, le lieu le plus fréquenté de Paris (dévots et touristes).

Lourdes qui attire des foules du monde entier.

Bien d’autres lieux d’apparitions jalonnent le territoire.

  • Chaque diocèse a son lieu de pèlerinage local, pour nous « L’ÉPINE » même si nous restons
  • sceptiques sur le récit traditionnel de la statue trouvée dans un buisson ardent.
  • Un fait indéniable, on a construit là, un sanctuaire en pleine guerre de 100 ans.
  • Ce qui a représenté un effort colossal sans autre raison
  • que la volonté des croyants. Depuis 500 ans il traverse les aléas de l’histoire.

Qu’est-ce qui justifie cette piété Mariale ? (qui peut apparaître excessive à certains !)

Marie est au centre de l’aventure chrétienne.

  • À l’annonciation Marie dit toute sa disponibilité à ce que Dieu lui demande

« Je suis la servante du Seigneur que tout se passe pour moi selon ta parole !  »

Ce n’est pas rien : car c’est un bouleversement total de sa vie : promise en mariage à Joseph,

elle se

préparait à une vie d’épouse et de mère semblable à la vie des autres femmes.

Bouleversement rendu possible par sa fréquentation des Écritures où bien d’autres femmes

ont vu leur vie réorientée par Dieu. Et par la prière des psaumes où l’on exprime la totale

confiance au Dieu de la vie, au Dieu de miséricorde.

  • Élisabeth résume bien l’attitude profonde, et le statut original de Marie.

Tu es bénie entre toutes les femmes.

Sa vie n’est pas guidée par la nécessité, ses désirs, ses ambitions ou ses rêves, bien que

ce ne fut pas totalement absents de sa vie comme pour nous mais par une priorité donnée à

Dieu nourrie par la méditation et la prière.

C’est un cheminement ouvert pour chacun, chacune de nous !

Marie en allant rencontrer sa parente Élisabeth, où Dieu est aussi intervenu dans sa propre vie.

C’est Élisabeth qui l’authentifie dans sa vocation de Mère du Messie :  »

Le fruit de tes entrailles est béni.

D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? Heureuse celle qui a cru. »

Consciente de l’écart infini entre sa pauvreté et l’exceptionnel de ce choix Marie pouvait

légitimement avoir des doutes, se demander si elle n’était pas dans l’illusion.

Dans la pratique juive et chrétienne Dieu entre en dialogue personnel avec ceux et celles qu’il a

choisis (rois, prophètes, juges), il envoie aussi auprès d’eux des témoins objectifs pour garantir

la réalité de leur mission,

au besoin les soutenir dans les moments de doute.

Croyants d’aujourd’hui, nous avons besoin de nos frères et sœurs dans la foi, pour

authentifier nos engagements, voire pour nous rassurer, nous aider à persévérer.

Mais également pour nous signifier que nous ne sommes pas propriétaires de notre mission.

Car nous ne sommes pas propriétaires de Dieu,

ni du Royaume des Cieux auquel il nous demande d’apporter notre part.

Comme Marie nous restons d’humbles servantes, d’humbles serviteurs.

Grâce à Élisabeth son aînée, Marie peut « se lâcher », laisser Dieu prendre librement toute

la place en elle et lui donner toute liberté.

  • Elle peut s’abandonner à la joie que connaissent ceux et celles qui remettent toute
  • leur vie entre les mains de Dieu.

Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur.

En même temps, elle se voit en vérité, sans orgueil du regard même que

Dieu porte sur elle. Il s’est penché sur son humble servante ; désormais, tous les âges me

diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles !

  • Elle peut regarder et voir le monde avec le regard de Dieu dans sa dimension spirituelle.

Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent.

Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour, de la promesse faite à nos pères.

Elle voit en même temps les répercussions sur l’histoire du monde, celles-là même que son

Fils Jésus va mettre en œuvre durant son ministère.

Déployant la force de son bras, il disperse les superbes.

Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.

Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides.

Ce que Marie découvre, médite, proclame au contact d’Élisabeth, elle va le vivre dans la banalité

d’une vie apparemment ordinaire.

Après 3 mois, elle s’en retourna chez elle.

Ce que nous célébrons en Marie, elle nous invite à le vivre à notre tour à entrer dans le même

dynamisme qu’elle dans le cadre de nos vies ordinaires. J’ai peu parlé de l’Assomption.

Le mot lui-même n’est pas dans l’Écriture comme le mot « Trinité », mais la réalité y est

bien présente comme en témoigne saint Paul aux Corinthiens.

De même que tous les humains meurent en Adam (du fait de participer à la vie)

de même c’est dans le Christ que tous recevront la vie, mais chacun à son rang :

en premier le Christ. Dès les premiers temps du christianisme, du fait que Marie a été associée

étroitement au Christ, particulièrement au pied de la croix, occupant un rang unique

il apparut logique qu’elle soit associée également d’une manière particulière à sa

victoire sur la mort, sans attendre comme nous le retour glorieux du Christ.

 

Homélie du 20e dimanche du temps ordinaire à Villeneuve saint Vistre

En cette période de vacances, on espérerait sans doute entendre des textes plus optimistes !

Jésus évoque successivement la lenteur avec laquelle son message est reçu, accepté,

la perspective de sa mort sur la croix, et sa propre angoisse.

Il constate les divisions qu’il provoque jusqu’au sein des familles. Et Jérémie raconte les tentatives

d’assassinat qui rôdent autour de lui.

Même en vacances,

Même dans une société de droit comme la nôtre, peut-on oublier la violence qui se déchaîne dans de nombreuses parties du monde, et qui existe, feutrée, dans notre propre société sécurisée !

 

De quel combat s’agit-il ? Il ne s’agit pas, bien sûr, de rajouter de la violence à celle qui existe déjà.

La lettre aux Hébreux nous précise « en présence du péché qui nous entrave tous courons avec

endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus qui est à l’origine et au terme

de la foi.

La 1re caractéristique à prendre en compte, c’est que le mal n’est pas simplement le fait des autres,

il n’est pas seulement extérieur à nous-mêmes il est aussi en nous, sous des formes bien diversifiées :

inertie, complicité tacite, réticences au changement, satisfaction tranquille.

Ce n’est pas un luxe, pour chacun de nous, de demander chaque jour dans le Notre Père

Ne nous laisse pas entrer en tentation mais délivre-nous du mal.

Dans la célébration du baptême, il y a la prière pour délivrer du mal. Ce n’est pas que l’enfant ait pu déjà commettre quelque chose de mal, mais pour lui rappeler que le mal est le grand défi que l’humanité doit relever, et qu’il ne pourra pas faire l’économie de ce combat.

Il ne sert à rien de se scandaliser du mal, d’en vouloir à ceux qui le commettent, et au passage d’en rendre

Dieu responsable, si on ne lutte pas personnellement contre, en soi d’abord, et autour de soi.

La lettre aux Hébreux nous dit.

Courons avec endurance l’épreuve…, les yeux fixés sur Jésus Christ.

Pour notre compréhension, en regardant comment Jésus s’est impliqué nous pouvons distinguer 3 temps

qui interfèrent les uns sur les autres, d’abord dans la tentation au désert. Il se met au clair avec lui-même.
Jésus a refusé de se laisser envahir par les besoins matériels conscient que le pain et la nourriture ne

suffisent pas même s’ils sont nécessaires à notre survie. L’homme est un être spirituel qui doit aussi être

nourri de la parole de Dieu.

Jésus a refusé de jouer au performant en se jetant du haut du temple, il faut bien reconnaître que la

publicité utilise le mensonge et le paraître pour une efficacité bien réelle mais discutable.

Jésus enfin a refusé de diviniser toute autorité terrestre, il a refusé tout pouvoir qui ne respecterait pas

la relation unique et originale de l’homme avec Dieu, et qui est la source de toute liberté authentique.

Si nous voulons vaincre le mal, il nous faut entrer dans cette démarche profonde nous aussi.

 

Le 2e temps qui nous est plus familier,

c’est tout le ministère de Jésus. Par de nombreux signes (les miracles !) il a manifesté clairement qu’on ne pouvait pas prendre son parti, de la maladie, de l’absence de nourriture, même du manque de vin à une

fête, de l’emprise du mal sur les possédés dépouillés de leur humanité, qu’il fallait refuser l’arrogance des savants et des puissants.

Donc en face du mal, il fallait vraiment faire quelque chose.

C’est ce qu’a compris l’abbé Pierre avec les mal logés, ce qu’a compris Mère Teresa avec les gens qui

mouraient seuls sur les trottoirs de Calcutta. Ce qu’a compris François devant les péchés de l’Église

(les abus d’autorité…).

C’est dans cette même ligne que s’engagent aujourd’hui de nombreux chrétiens et des hommes et

femmes de bonne volonté. C’est dans cette dynamique également que l’on prie les litanies des saints au baptême « Nous qui sommes entourés d’une nuée de témoins. »

Le 3e temps est plus difficile. L’épître aux Hébreux dit encore

Renonçant à la joie qui lui était proposée, Jésus a enduré la croix.

Méditez l’exemple de celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle hostilité, et vous ne serez

pas accablés par le découragement.

Jésus n’a pas supprimé tout le mal du monde mais il l’a attaqué à sa racine.

Il l’a pris sur lui : dans sa passion, il a laissé déferler sur lui, la haine, la bêtise humaine, la violence,

la soif de pouvoir.

Dans ce cyclone, Jésus est resté debout, non par orgueil, mais en solidarité avec tous les blessés de la

terre, y compris avec les 2 bandits crucifiés avec lui.

Il a refusé de haïr, de condamner qui que ce soit, même ceux qui l’ont condamné et continuaient de

l’insulter ! Au déferlement du mal il a opposé l’amour et le pardon.

À l’obscurité de la souffrance extrême, de la mort injuste, et de l’absence apparente de Dieu qui faisait

dire à la femme de Job et sans doute à beaucoup d’entre nous  » Maudis Dieu et meurs !  »

Jésus a d’abord exprimé sa souffrance comme beaucoup d’entre nous :

Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?

Pour terminer par une confiance totale au Dieu de la vie

Père entre tes mains je remets mon Esprit

C’est aussi ce qu’a vécu Edith Stein juive devenue carmélite, déportée et exécutée à Auschwitz

le 9 août 42 en représailles à la protestation publique des évêques de Hollande.

La dernière parole qu’on lui connaît au moment de son arrestation à sa sœur Rosa devenue chrétienne

elle aussi « Viens c’est pour notre peuple« .

Homélie du 19e dimanche du temps ordinaire à Sézanne

L’Évangile de ce dimanche fait suite à celui de la semaine dernière que je me suis risqué à commenter ici-même !

Peut-on encore lire aujourd’hui ces textes sur l’usage des biens matériels ?

Les conditions de vie et de travail sont tellement différentes entre Jésus et nous !

  • Entre les 2 passages de l’Évangile un passage célèbre a été omis :

Celui sur les oiseaux qui ne sèment pas ni ne moissonnent et qui sont pourtant nourris par Dieu, or nous

savons tous que beaucoup d’espèces de la vie sauvage sont menacés d’extinction par l’homme. L’homme serait-il plus puissant que Dieu ?

Sur les fleurs des champs qui ne filent ni ne tissent et n’en sont pas moins vêtues de splendeur, or nous

savons que les plantes sauvages disparaissent avec les traitements chimiques.

Peut-on se consoler seulement avec cette parole : « Soyez sans crainte, petit troupeau : votre Père a trouvé

bon de vous donner le Royaume. »

Jésus continue : Vendez ce que vous possédez et donnez-le en aumône.

Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas, un trésor inépuisable dans les cieux.

  • Les premiers chrétiens de Jérusalem, qui attendaient le retour de Jésus Christ dans l’immédiat,
  • ont pris ces paroles à la lettre, à la suite de Barnabé, ils ont tout partagé.

Ce fut une réussite fraternelle et un échec économique.

  • Je crois comprendre que plus nous avons de biens matériels à disposition, plus il nous faut acquérir
  • une liberté, et ne pas en devenir esclaves.

Le mot AUMÔNE n’a plus la cote aujourd’hui, on lui préfère le mot PARTAGE.

Nos biens ne sont pas notre propriété exclusive, ils sont grevés d’une hypothèque sociale.

  • Spontanément ceux et celles qui cultivent un jardin se font un plaisir de partager leur excédent de récolte. Et nous préférons donner à Emmaüs pour recyclage plutôt que mettre à la déchetterie.
  • Le partage a pris dans les sociétés développées une dimension institutionnelle. Les pouvoirs publics
  • ont mis en place des assurances, maladie, chômage, des retraites, des allocations handicapés,
  • étudiants, migrants.

Une part importante de nos impôts est consacrée à la solidarité.

Il me paraît nécessaire d’avoir un regard de foi sur ces pratiques publiques, s’en réjouir, même si nous considérons que des réformes sont nécessaires. N’oublions pas que notre devise républicaine a ces deux

mots Égalité, Fraternité.

  • Comme les pouvoirs publics sont plutôt lents à réagir à de nouveaux besoins, de multiples
  • associations de solidarité naissent un peu partout :

Dans ce domaine les chrétiens n’ont pas à rougir, ils sont à l’initiative entre autre du Secours Catholique,

du CCFD-Terre Solidaire, des compagnons d’Emmaüs Habitat et Humanisme, du Service Jésuite aux

Migrants. Les citer toutes demanderaient des heures. L’appel de dimanche dernier en est une illustration.

N’oublions pas, que beaucoup de nos contemporains très réservés sur l’Église continuent à la considérer, l’accepter, voire l’aimer et y participer, précisément à cause de sa solidarité avec les pauvres.

 

Ce qui n’est pas dépensé en solidarité, on le dépense en forces de maintien de l’ordre, en équipement de sécurité, en murs qui se veulent infranchissables autour de propriétés ou de lotissements réservés.

Notre solidarité, le partage n’a pas qu’une dimension utilitaire ; pour la paix sociale, pour le

fonctionnement harmonieux de notre société.

Le partage a quelque chose à voir avec le Royaume des Cieux, avec le projet que Dieu a sur l’humanité.

Dieu a mis gratuitement toutes les richesses de la terre au service de tous les hommes. L’accaparement

d’une minorité au niveau mondial est en contradiction avec le don de Dieu.

Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas, un trésor impérissable dans les cieux , là où le voleur

n’approche pas, où la mite ne détruit pas. Car là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur.

Notre relativisation des biens matériels, le partage est le témoignage que l’homme est appelé à une

autre vie, où la seule loi, la seule pratique sera l’Amour, l’ouverture totale au mystère de l’Autre. Comme

Dieu le Père se communique totalement à son fils où le Fils est tout entier accueil du don de la vie du Père,

dans un amour sans ombre ni égoïsme, le Saint Esprit qui les met en échange permanent.

C’est ce que nous devons anticiper dès maintenant, comme nous le rappelle la lettre aux Hébreux à

propos des patriarches :

Sur terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs(nous le sommes également !)

C’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie. En fait, ils aspiraient à une patrie meilleure, celle des cieux.

C’est aussi ce que nous recommande Jésus avec la comparaison des serviteurs qui veillent dans l’attente du retour de leur maître.

Restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins et vos lampes allumées.

Heureux ces serviteurs que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller.

C’est lui qui, la ceinture aux reins, leur fera prendre place à table et passera pour les servir.

Nous sommes tous concernés par cette promesse et cette invitation.

Puisque nous avons laissé momentanément notre travail et nos occupations pour les présenter à Dieu

et les partager avec nos frères et sœurs en humanité en partageant le pain et le vin qui annonce le

banquet des noces éternelles.

Heureux sommes-nous d’être invités et surtout de répondre à l’invitation.

 

 

Homélie du 18e dimanche du temps ordinaire à Sézanne

Les textes de ce dimanche sont d’une très grande richesse, mais aussi d’actualité :

La moisson terminée, chacun fait ses comptes et organise son avenir comme le fait l’homme de la parabole.

Ceux et celles qui prennent des vacances se disent aussi comme lui, « Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.  »

Je reviendrai, après, sur le refus de Jésus de régler le partage entre 2 frères.

Jésus s’adresse à tous

Gardez-vous bien de toute avidité, car la vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas

de ce qu’il possède.

Et cette question Ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?

  • Jésus reprend à son compte la réflexion de Qohèleth. Je ne peux pas tout relire.
    Ce qui me paraît intéressant, c’est que nous sommes dans une sagesse populaire. Celle que
  • pratiquaient les gens du peuple. Celle que prônaient les philosophes grecs (et particulièrement les stoïciens).

C’est donc la réflexion des philosophes païens, et des gens simples qui est entrée dans la Bible hébraïque traduite en grec et dans la Bible chrétienne.

Il serait donc contraire à la fidélité au Dieu créateur de négliger cet apport à la vie de l’homme.

Notre société malgré ses dérives continue à donner des conseils de modération, de sobriété, des règles de prudence ou de bon sens que nous serions présomptueux de ne pas entendre et pratiquer. Tout le monde connaît le proverbe « On n’a jamais vu un coffre-fort suivre un corbillard« .

  • Si Jésus a pu assumer cette sagesse universelle, c’est parce que lui-même l’applique dans sa propre
  • vie et son ministère, lui qui à la fois « n’avait pas de pierre où reposer sa tête« , acceptait l’hospitalité de Zachée, de Marthe, Marie et Lazare, d’avoir chez eux un pied-à-terre permanent, et de donner du vin en abondance aux noces de Cana.

La pauvreté de Jésus est relative, elle n’est pas une réaction de jalousie envers ceux qui possèdent,

elle n’a pas sa source dans la frustration. Elle s’enracine dans les vraies valeurs : L’Amour de Dieu et le

service du prochain et la dignité de l’homme.

Saint Paul dit aux Colossiens : Faites donc mourir en vous ce qui n’appartient qu’à la terre (particulièrement) cette soif de posséder, qui est une idolâtrie.

Ce qui m’est apparu comme le plus original dans l’évangile de ce dimanche c’est le refus de Jésus :

Homme, qui donc m’a établi pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ?

  • Jésus, malgré son autorité reconnue par beaucoup ne se donne pas le droit de juger de tout.

Il reconnaît la compétence et l’autorité de ceux qu’aujourd’hui nous appelons les notaires, ou les hommes

de lois. Lors du questionnement des pharisiens sur l’impôt, Jésus reconnaît la légitimité du pouvoir

politique : Rendez à César ce qui est à César, et ne refuse pas à Pilate le pouvoir de condamner ou acquitter,

il lui rappelle cependant que ce n’est pas un droit absolu.

  • En ce temps du Synode,

On ne saurait demander aux évêques et aux prêtres d’avoir l’autorité et la compétence pour trancher toutes

les questions relatives à la conduite individuelle, aux questions de société, ni même de la réforme de l’Église.

De ce fait les ministres ordonnés (évêque, prêtre) se doivent d’avoir l’humilité et la sagesse de le reconnaître pour eux-mêmes. C’est ce qu’ont fait les évêques avec la commission SAUVÉ.

  • Si Jésus rappelle la légitimité des pouvoirs civils

Il serait présomptueux de ne pas tenir compte de toutes les sciences et les savoirs que les hommes ont accumulé ces dernières années. Car Dieu nous parle aussi avec ce langage.

Il ne suffit pas d’ouvrir la bible pour avoir une solution « clés en main ».

Nous avons besoin des sciences du climat et du vivant pour les choix économiques pour l’organisation de la société et nos styles de vie personnelle.

Nous avons besoin des sciences de l’homme, de la psychologie pour l’éducation des enfants, la conduite de nos relations interpersonnelles, la réussite des couples.

Nous avons besoin de la médecine pour les questions de bioéthique.

On peut allonger la liste à l’infini.

  • Tous ces domaines demandent des compétences sérieuses qui sont entre les mains des hommes et femmes chrétiens et des hommes et femmes de tout bord, et que ne peuvent maîtriser seuls les
  • évêques et les prêtres ! Il est nécessaire qu’une parole au nom de l’Église vienne aussi des laïcs.

Seule l’écoute mutuelle, le partage des savoirs, y compris religieux, peut nous permettre d’accéder à une

vérité au service des hommes. Car la vérité n’est pas la propriété d’une personne, ou d’une seule catégorie

de gens.

Avec la parabole, Jésus élargit le regard de ses auditeurs.

La vie humaine n’est pas enfermée sur cette terre, ses contraintes et ses richesses.

Mais Dieu lui dit : « Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Ce que tu auras accumulé, qui l’aura ? » Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu.

Ce n’est pas être rabat-joie de rappeler que l’homme est mortel. C’est au contraire une opération vérité, qui donne sa juste valeur à ce que nous entreprenons.

Chrétiens nous sommes témoins que notre vie terrestre est l’apprentissage de la vie définitive.

Lequel

d’entre nous trouverait-il normal de passer toute sa vie à l’école sans jamais exercer les métiers qu’il aurait appris.

Dans tout ce que nous faisons nous sommes en apprentissage de la vie définitive, en apprentissage de

l’Amour infini, en apprentissage pour connaître tous les mystères du monde. Ce que dit saint Paul aux Colossiens.

Frères, si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut :

C’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu.

Vous vous êtes débarrassés de l’homme ancien qui était en vous et des façons d’agir, et vous vous êtes

revêtus de l’homme nouveau qui, pour se conformer à l’image de son Créateur, se renouvelle sans cesse

en vue de la pleine connaissance.

Faire l’impasse sur la vie éternelle, ce serait ni plus, ni moins vider la foi chrétienne de tout contenu, et considérer que Jésus est mort pour rien.

Homélie du 17e dimanche du temps ordinaire à Clesles

Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière.

Cela n’a pas échappé aux disciples, sans oublier que certains des disciples avant de suivre Jésus

avaient été disciples de Jean Baptiste, et que celui-ci leur avait appris à prier.

Jésus ne priait pas seulement dans un lieu indéterminé, il se retirait fréquemment dans l

a solitude de la nuit et d’endroits déserts pour prier Dieu son Père.

Il était aussi un familier de la prière juive par le chant ou récitation des psaumes à la synagogue

ou au temple de Jérusalem.

S’il est vrai que : « Le disciple n’est pas plus grand que son maître, mais tout disciple bien formé

sera comme son maître« ,aucun chrétien ne peut se dispenser de priercela touche notre être-même.

Dans sa lettre aux Colossiens, saint Paul nous dit aujourd’huiPar le baptême vous avez été mis au tombeau,

et vous êtes ressuscités avec lui par la foi en la force de Dieu qui l’a ressuscité d’entre les morts.

Dieu nous a donné la vie en Christ.

L’identification à Jésus Christ, la vie en Christ ne se fait pas seulement par le geste de l’immersion,

accompli une fois pour toutes. Elle se fait au jour le jour par la prière quotidienne.

Lors de l’onction avec le Saint Chrême qui suit le geste de l’eau, il est dit au nouveau baptisé

Tu participes à la dignité même de Jésus comme prêtre, prophète et roi. « prêtre » dans la foi chrétienne

ne signifie pas « sorcier » ou « chaman » mais celui qui se tient devant Dieu dans la prière comme le faisait

Jésus.

De nombreuses voix se sont élevées pour dire que le synode serait un échec s’il n’était pas accompagné

de la prière des participants.

 

Il nous faut sans cesse se refaire une conviction sur la nécessité de prier.

Encore faut-il savoir pourquoi.

La prière est avant tout une demande adressée à quelqu’un de plus grand que nous, et qui disposede quelque chose que nous n’avons pas, et qui nous est nécessaire.

Dans la parabole de l’ami sans gène, son voisin a du pain, et lui n’en a plus, et qui plus est,

il ne peut assurer dignement son devoir d’hospitalité, alors il continue de frapper à la porte et de

demander jusqu’à obtenir gain de cause.

Abraham n’hésite pas à insister auprès de Dieu pour l’empêcher de détruire la ville de Sodome, tout simplement parce que Loth son neveu y habite.

Évidemment si nous pensons pouvoir assurer nous-mêmes tous nos besoins sans l’aide de qui que

ce soit, nous n’avons plus besoin de prier, mais dans ce cas nous serions totalement déconnectés de

la réalité. Car nous n’existons que grâce aux autres, à ceux qui nous ont précédés. Tous les débats autour

de la guerre en Ukraine nous le montrent quotidiennement. Ce qui se passe là-bas a des répercussions sur

nous et sur le monde entier.

Ce n’est pas humiliant ou déshonorant de reconnaître notre dépendance ! C’est même une condition pour accéder à notre pleine humanité.

Heureux ceux qui ont un cœur de pauvre, le Royaume des Cieux est à eux !

La prière n’est pas une démission de notre responsabilité d’homme ou de femme.

Elle est un engagement ferme de toute notre personne, pour obtenir ce dont nous avons besoin

Demandez, on vous donnera ;

Cherchez, vous trouverez ;

Frappez, on vous ouvrira.

La prière ne se découvre qu’en la pratiquant. Car son efficacité première n’est pas de changer le cours

des choses, mais de changer notre cœur et de nous faire redécouvrir la force qui nous habite et que nous

ignorions, nous fait prendre conscience des richesses que nous avons déjà entre nos mains.

Le récit de la multiplication des pains est édifiant (constructif) à ce niveau. Les disciples commencent par

dire à Jésus Renvoie la foule on ne peut rien faire pour eux. C’est seulement lorsque Jésus leur répond : donnez-leur vous-mêmes à mangerqu’ils découvrent qu’ils ont encore 5 pains et 2 poissons que Jésus

pourra bénir et distribuer.

Jésus nous assure que Dieu répond efficacement à notre prière.

Quiconque demande, reçoit

Qui cherche, trouve

à qui frappe, on ouvrira.

Mais d’une efficacité qui n’est pas à la mesure de nos désirs immédiats et limités, de nos désirs parfois

même coupables

Si donc vous, qui êtes mauvais,

Vous savez donner de bonnes choses à vos enfants,

Combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent.

Dans la prière du Notre Père Jésus nous dit ce qu’il faut demander, c’est précisément ce que l’Esprit Saint

veut accomplir en nous.

Que Dieu soit connu et adoré en vérité, pour que nous sachions d’où nous venons et où nous allons. Car la vérité sur Dieu est inséparable de la vérité sur l’homme. L’homme n’est pas seulement un accident de l’évolution et du hasard, il est voulu par Dieu, invité à s’élever au-dessus de sa condition biologique pour

être l’interlocuteur privilégié de Dieu.

L’homme est invité à être collaborateur de Dieu pour la réussite de l’aventure humaine et notre réussite personnelle, en rejetant résolument le mal et toutes les forces de mort actives dans le monde et dans notre cœur.

En faisant de notre monde une communauté de partage dans l’amour, où chacun est au service des autres

par le partage du pain et de tous les biens matériels et spirituels nécessaires à la réussite de tous.

Conclusion : Il est évident que je n’ai pas épuisé le sujet, pour le moins j’espère vous aider un peu à trouver le temps et le courage de prier.

 

 15e dimanche du temps ordinaire  à Saint Quentin

Cette parabole est bien connue, sa méditation ne peut se limiter à la dimension morale.

Mais plutôt tenter de voir un peu les enjeux d’humanité qu’elle soulève : Une occasion nous est offerte

de sortir de la routine. D’abord s’arrêter à quelques points du récit.

  • Le docteur de la loi et Jésus ne sont pas sur la même longueur d’onde le docteur se présente
  • sous le beau jour d’une recherche spirituelle.

« Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? »

Saint Luc précise que sa question est posée pour mettre Jésus à l’épreuve.

La suite suggère que le docteur de la loi connaît la réponse à sa question puisqu’il peut citer le

Lévitique et le Deutéronome « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu… et ton prochain comme toi-même. »

Jésus dans sa conclusion inverse la démarche, tu sais bien ton catéchisme mais l’enjeu c’est de le

mettre en pratique « Fais ainsi et tu vivras« .

  • On retrouve avec la parabole du Samaritain qui secourt un Juif blessé la même opposition.
  • Lui voulant se justifier questionne Jésus « Qui est mon prochain » et Jésus qui lui fait voir qu’il a
  • aussi réponse à sa 2e question Celui qui a fait preuve de pitié envers lui.

Là encore l’enjeu c’est de mettre en pratique : « Va, toi aussi, fais de même« .

  • Jésus illustre par la parabole, l’enjeu véritable. Il met en scène un prêtre et un lévite qui sont
  • des personnages religieux tout comme le docteur :

les premiers chargés des cérémonies, le second chargé de l’enseignement de la loi.

Il vit et passa de l’autre côté. Survient le Samaritain, qui appartient à cette partie du peuple juif qui

refuse le culte du temple de Jérusalem et qui est considéré comme hérétique, dans l’erreur,

mais lui agit : Il vit et fut saisi de compassion s’approcha, le soigna et le secourut.

Dans le domaine religieux encore aujourd’hui les belles paroles ne garantissent pas toujours les

bonnes intentions. Nous avons à être vigilants sur nous-mêmes, et ne pas essayer de paraître

meilleurs que nous sommes, d’ailleurs nos auditeurs ont peu de chance de se laisser tromper et endormir.

Avec la parabole Jésus nous interpelle sur l’amour du prochain.

Nous ne voyageons pas entre Jérusalem et Jéricho, et nous ne rencontrons pas de blessés à secourir,

et dans ce cas il faudrait appeler les pompiers et surtout ne pas toucher le blessé, à moins d’être diplômé

dans le domaine des secours.

  • Nous sommes sollicités par de nombreux courriels, prospectus, appels à la télé qui jouent sur
  • la corde sensible, cherchant le plus souvent à nous culpabiliser avec la misère des autres,
  • comme la guerre en Ukraine est abondamment utilisée dans ce sens.

Le comportement du Samaritain peut nous éclairer.

Il n’a pas cherché à s’inventer de bonnes actions, c’est dans le cours de son activité, un voyage

professionnel ou familial, qu’il se trouve en présence d’un blessé en péril de mort,

il n’a pas cherché après. Comme le prêtre et le lévite, il le vit, mais lui seul fut saisi de compassion.

Compassion signifie souffrir avec ; le Samaritain se sent concerné dans sa chair par ce qui est arrivé à

cet homme et réalise aussitôt que s’il ne fait rien, il va mourir. Ce qui suscite ses gestes de solidarité

malgré les risques que ça comportait pour lui. Il s’approcha, pansa ses blessures, le chargea sur sa monture.

Conscient qu’à lui seul, il ne peut subvenir à tous ses besoins, il le confie à l’aubergiste.

  • Ce que Jésus met derrière l’expression « aimer son prochain » est une bonne boussole pour nous.
  • Jésus n’insiste pas sur l’état psychologique du Samaritain simplement saisi de compassion.
  • Par contre Jésus insiste sur le voir, voir dans notre entourage, et sur les gestes salvateurs,
  • et la mise en route, l’association avec d’autres pour être efficaces.

On peut penser qu’à ce niveau Jésus nous dit : Va, et toi aussi, fais de même.

Je ne voudrais pas terminer sans dire que dans le domaine de la solidarité les chrétiens

n’ont pas démérité. Déjà si des associations demandent de l’argent aux chrétiens c’est parce qu’ils

savent bien qu’ils donnent généreusement. Sans la participation des chrétiens bien des associations

auraient fermé depuis longtemps, y compris des associations non confessionnelles : Coluche avait

l’honnêteté de dire que derrière lui, loin des caméras, c’étaient 4 chrétiens convaincus et compétents

qui ont assuré la réussite des Restos du Cœur. Et si tous les maires chrétiens se retiraient des mairies,

il y aurait un grand vide en France. C’est à des chrétiens que l’on doit la journée mondiale du refus de

la misère, le père Wresinski et Geneviève de Gaulle-Anthonioz, la journée mondiale de la lutte contre

la lèpre Raoul Follereau, etc.

Rappelons enfin qu’il n’y a pas de contradiction entre l’Amour du prochain et l’Amour de Dieu.

Ce n’est pas un hasard, si le seul geste que Jésus a voulu transmettre à ses disciples pour maintenir

vivante la mémoire de sa venue, c’est un geste fraternel : Le partage du pain et du vin, qui est en même

temps action de grâce Eucharistie pour le don de l’Amour de Dieu envers l’humanité, qui se manifeste

dans la richesse de la création, et surtout le don de lui-même sur la croix.

L’Amour de Dieu ne peut que stimuler l’Amour de nos frères. Il ne peut pas lui faire obstacle sinon à

se détruire de l’intérieur. C’est bien l’insistance de Laudato si et Fratelli tutti.

14e dimanche du temps ordinaire  à Anglure

Frères, pour moi, que la croix de notre Seigneur Jésus Christ reste ma seule fierté.

Je porte dans mon corps les marques des souffrances de Jésus.

Saint Paul serait-il masochiste ?  C’est un reproche qui est fait aux chrétiens d’avoir sacralisé

la souffrance un reproche qui rejoignait parfois la réalité.

  • Ma sœur aînée entrée au Carmel de Troyes en 1945 m’a raconté que la prieure de l’époque
  • incitait les religieuses à souffrir pour expier les péchés de la révolution française
  • fort heureusement elle ne s’est pas laissée contaminer par cette conception de la vie religieuse.
  • Une de mes tantes maternelles était dans l’admiration de sa propre mère qui (selon elle)
  • avait demandé 2 grâces lors de son mariage, avoir beaucoup d’enfants et souffrir beaucoup.
  • (« avoir beaucoup d’enfants » je ne me prononce pas) mais « souffrir beaucoup » c’est horrible !

Il n’est pas étonnant que de telles mentalités aient laissé des traces dans l’inconscient collectif,

et provoque une défiance instinctive envers Dieu et la religion.

On peut comprendre que des générations qui ont connu la pauvreté généralisée 3 guerres

en 1 siècle aient cherché à trouver une réponse à la souffrance omniprésente.

Jésus n’a jamais encouragé qui que ce soit à souffrir. Tout au contraire il a guéri de nombreux

malades, s’est opposé aux pouvoirs oppresseurs qu’ils soient religieux, sociaux, politiques.

Donc cette question incontournable . Quelle relation avoir avec la croix de Jésus ?

Le signe de croix est plus que familier pour les chrétiens orientaux et catholiques.

Les protestants, je crois ne le pratique pas. Il introduit et clôture la messe. Il n’est peut-être pas

inutile de réfléchir un peu à cette relation que nous avons avec la croix.

C’est un rite qui débute le baptême, il est demandé aux parents parrain et marraine de faire

le signe de la croix sur l’enfant à la suite du prêtre. Sachant que ces jours-là, ainsi qu’aux

mariages et obsèques la majorité de l’assemblée ne le fait pas en même temps que la personne

qui préside, je leur demande :

« Est-ce que ça vous pose question de faire un signe de croix sur votre enfant ? »

Toutes les fois, on me répond  Non !

Et je leur fais part de mon étonnement, qui n’est pas simulé mais réel.

Parce que ça touche un point important de leur vie, et de la nôtre !

Je repose une nouvelle question : Qu’est-ce que vous souhaitez pour votre enfant ?

La réponse est la même pour eux et pour nous : beaucoup de bonheur, la santé, la réussite,

une longue vie.

Pensez-vous que mourir à 36 ans sur une croix en voyant l’effondrement de tout ce que vous

avez fait soit signe de bonheur et de réussite : réalisez qu’il y a quelque chose de scandaleux à

faire un signe de croix sur un enfant, et sur nous-mêmes.

Alors qu’est-ce qui justifie l’insistance sur la croix ?

Ce n’est pas de n’importe quel crucifié, dont nous faisons mémoire. N’oublions pas que des dizaines

de milliers d’hommes sont morts crucifiés au cours de l’antiquité. Comment se fait-il que

l’humanité n’ait vraiment retenu le nom d’un seul. (Ne disons pas trop vite « parce qu’il est ressuscité »).

La réponse est dans le témoignage de l’officier romain qui n’avait rien à voir avec la foi chrétienne

juge là : « Vraiment cet homme était fils de Dieu« .

Il a été témoin d’un homme qui dans des souffrances extrêmes garde sa dignité d’homme ne se

laisse pas aller à la haine, à maudire les hommes et à rejeter Dieu, mais garde une confiance totale

au Dieu de la vie, et va jusqu’à pardonner à ses bourreaux.

Ce que voit l’officier romain, c’est que déjà s’ouvre un chemin d’humanisation dans le cadre

précisément d’une déshumanisation programmée par d’autres hommes. Il voit un homme

qui vit jusque dans ses plus ultimes conséquences, dans sa propre chair, la solidarité avec

toutes les souffrances injustes de ses frères et sœurs en humanité.

Et cela, précisément dépasse l’humanité, manifeste quelque chose du vrai Dieu.

Aujourd’hui encore, tout homme ou femme peut se reconnaître dans ce Jésus mort sur la croix qu’il soit chrétien, athée, agnostique.

La fierté de saint Paul n’est pas à mettre d’abord dans la capacité à supporter de grandes souffrances,

une performance macabre en quelque sorte. Mais à proclamer et vivre la dignité de l’homme lorsqu’elle

lui est niée par d’autres et que l’on risque de se la nier à soi-même.

Et ceci garde encore toute son actualité pour nous. Car nous portons tous une part de souffrance

dans notre vie. Saint Paul nous le laisse entendre :

« Par elle, (la croix de Jésus) le monde est crucifié pour moi, et moi pour le monde« .

Par la foi les chrétiens ne s’arrêtent pas là.

La résurrection de Jésus nous permet (et nous oblige ?) d’aller beaucoup plus loin. Aucun pouvoir sur

terre ne peut rendre la vie à un mort, il y faut l’intervention explicite de Dieu le maître de la vie.

En libérant Jésus du tombeau, Dieu authentifie le don de la vie que Jésus a fait de lui-même sur la croix

et il authentifie que c’est bien une démarche d’amour. Les plaies montrées à ses disciples témoignent

de l’unité inséparable entre la mort de Jésus sur la croix et sa vie plus forte que la mort et le péché.

Ceci a une conséquence radicale pour nous.

Nous avons la certitude que toute mort, toute souffrance, tout échec, s’ouvre sur la vie portée à l’infini.

Nous ne marchons pas vers le retour au néant nous marchons vers la vie absolue.

Une seule condition pour nous, celle de choisir d’aimer, même si ça paraît impossible, même si

ça paraît inutile. Si telle est notre démarche profonde de vie, nous pouvons alors reprendre à notre

compte cette parole de saint Paul :

Pour moi, que la croix de Notre Seigneur Jésus Christ reste ma seule fierté.

Comme ça dépasse nos forces, nous venons à l’eucharistie nous replonger dans la mort et

résurrection de Jésus pour qu’il réalise en nous ce qui nous dépasse.

13e dimanche du temps ordinaire à Nesle-la-Reposte

Les textes de ce dimanche nous présentent une belle diversité de rencontres.

  • Élisée est en train de labourer. Il n’a pas pensé que le prophète Élie viendrait bouleverser sa vie
  • organisée autour de son travail. Il lui faut un peu de temps pour réaliser ce qui lui arrive.

Élie lui-même se demande s’il a bien fait et lui dit : Va-t’en, retourne là-bas ! Je ne t’ai rien fait.

Après le temps des hésitations, vient pour Élisée le temps du choix, le temps de la détermination,

d’abord il brûle ses vaisseaux dirait-on aujourd’hui.

Puis il se leva, partit à la suite d’Élie et se mit à son service.

  • La rencontre entre les disciples et les Samaritains qui est plutôt une non-rencontre
  • « On refusa de le recevoir parce qu’il se dirigeait vers Jérusalem ».
  • Jacques et Jean vis à vis des samaritains sont sans nuances

Seigneur, veux-tu que nous ordonnions qu’un feu tombe du ciel et les détruise ?

  • Jésus n’impose pas sa présence aux Samaritains qu’il ne pouvait pas ne pas rencontrer en
  • traversant leur pays.

D’abord il a envoyé des messagers pour préparer sa venue.

Et il refuse catégoriquement les représailles que Jacques et Jean proposent. Se retournant,

il les réprimanda. Puis ils partirent vers un autre village.

  • Sur la suite du parcours, un homme vient à Jésus plein de bonne volonté. Jésus ne cache pas la
  • difficulté de le suivre. Es-tu en capacité de vivre la pauvreté :  » Les renards ont des terriers,
  • les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête.
  • Pour la 2ème c’est Jésus qui a l’initiative de la rencontre « suis-moi » en lui précisant bien
  • « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi pars, et annonce le règne de Dieu ».
  • Je ne pense pas que Jésus refuse que l’on prenne du temps pour des obsèques dans la dignité,
  • par contre Jésus rappelle à cet homme que l’annonce du règne de Dieu a plus d’importance encore.
  • Avec le 3e qui dit aussi « je te suivrai » Jésus rappelle qu’on ne revient pas en arrière.
  • Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le royaume de Dieu.

On peut au moins remarquer que dans ces rencontres, Jésus ouvre un avenir aux personnes rencontrées, annoncer le Royaume de Dieu, mais dans un respect absolu de leur décision et liberté. Jésus marque clairement les exigences d’une relation sérieuse avec lui. Pauvreté, distance avec les autres relations

y compris familiales, persévérance (dans l’engagement).

On nous dit que les vacances sont le temps des rencontres nouvelles.

Pour ceux et celles qui n’en prennent pas, c’est toujours le temps des rencontres.

Si nos rencontres ne se limitent pas au superficiel et à l’utilitaire, nous savons que chaque rencontre

est une aventure qui ne nous laisse pas indemne, une aventure qui ne se programme pas à l’avance

et fait appel au meilleur de notre humanité, de part et d’autre.

C’est bien pourquoi le regard vers Jésus n’est pas inutile.

Pouvons-nous avoir nous-mêmes la liberté qu’avait Jésus dans ses rencontres ?

Saint Paul nous dit que c’est possible.

Frères, c’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a libérés.

Frères, vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour

votre égoïsme ;  au contraire, mettez-vous, par amour, au service les uns des autres.

La clef de la liberté n’est pas dans l’autonomie absolue, dans la possibilité de faire tout ce qui

nous passe par la tête, dans la capacité à posséder tout ce qui nous ferait plaisir, mais seulement

dans l’amour authentique. Pourrait-on dire à une femme qu’elle se rend esclave en donnant la vie à

un enfant ? Pourrait-on dire à deux jeunes qu’ils se rendent esclaves en s’aimant.

Pourrait-on dire à Mère Teresa qu’elle s’est faite esclave en donnant sa vie pour les gens qui mourraient

sur les trottoirs de Calcutta ? Tous ceux et celles qui un jour ont osé se risquer dans une relation

authentique ont fait l’expérience qu’ils se sont trouvés enfin, qu’ils sont sortis de la banalité et du

non-sens de la vie. Toute la loi est accomplie dans l’unique parole que voici « Tu aimeras ton prochain

comme toi-même. »

Celui, celle qui aime ne vit plus sous la contrainte sociale, ni même sous la contrainte morale.

C’est l’amour qui le transfigure de l’intérieur qui est la source vive et heureuse, de ses paroles,

de ses actions. Cela nous a été donné par ceux et celles qui nous ont rencontré et aimé gratuitement

et qui nous rendent capables de rencontrer et aimer gratuitement à notre tour.

Si nous aimons en vérité, alors nos relations ne sont plus dangereuses. Elles nous font vivre

personnellement, nous révélant à nous-mêmes, et dans ce cas même l’échec est supportable,

puisque nous sommes dans le domaine de la gratuité absolue.

C’est ce que Jésus a vécu dans toutes les rencontres qui jalonnent sa vie publique.

Et ce jusque dans sa passion et sa mort sur la Croix où il a vécu l’amour des autres jusque dans

ses plus profondes exigences. En toute liberté !

Saint Jean commence le récit de la passion par le lavement des pieds à la dernière cène avec

ces mots : Jésus sachant que son heure était venue, l’heure de passer de ce monde à son Père,

lui qui avait aimé les siens qui étaient dans le monde les aima jusqu’à l’extrême.

Nous le rappelons dans la 2e prière eucharistique par ces mots :

Au moment d’être livré et d’entrer librement dans sa passion, rappel qui est fait bien sûr pour

nous faire vivre, rencontrer, aimer à la manière de Jésus Christ.

Fête du Corps et du Sang du Christ à Sézanne

Les chrétiens ont toujours pensé que l’Eucharistie était au centre de la démarche chrétienne.

Elle fut « pratiquée » dès l’origine comme en témoignent les Actes des Apôtres et les lettres de saint

Paul (le récit le plus ancien est celui de saint Paul que nous venons d’entendre).

Dès l’origine nous rencontrons aussi des regards différents qui sont pour nous aujourd’hui des

chemins de liberté. Le rituel de la messe n’a pas été écrit dans le ciel et tombé un jour au milieu de

nous,  fixé et invariable. Il y a tout de même quelques différences entre la splendeur des liturgies

orientales, la solennité d’une messe aux JMJ avec un million de jeunes, la simplicité de nos messes

paroissiales et le dénuement d’une messe en semaine. Avant tout la messe est un repas.

Le repas est un rituel dans toutes les civilisations. Il a même résisté aux profonds bouleversements de

notre société. Les familles se retrouvent toujours les dimanches et fêtes autour d’une table.

Dès que les mesures de protection COVID se sont assouplies, les repas entre amis ont repris, les repas

collectifs comme la fête des voisins, les repas d’association, les repas communaux (hier soir à Sézanne

dans le cadre de la fête moyenâgeuse). Partager un repas, c’est entrer dans la vie les uns des autres,

c’est appartenir à la même communauté humaine. Il n’est pas surprenant que Jésus ait accepté de

nombreuses invitations au cours de sa vie publique : Zachée le reçut avec joie.

Mais aussi Simon le pharisien qui l’avait invité « par politesse » ou pour le tester.

Jésus avait apparemment une invitation permanente chez Marthe, Marie et Lazare près de Jérusalem,

là il pouvait souffler un peu ! Les repas ne sont pas seulement une question de nourriture. Ils ont un

enjeu spirituel. Jésus a invité à son tour précisément pour ouvrir ses invités à la dimension spirituelle de

la vie : lors de la multiplication des pains et des poissons Jésus adresse cette parole aux convives :

Il faut vous mettre à l’œuvre pour obtenir non pas cette nourriture périssable, mais la nourriture qui

demeure en vie éternelle. Le Jeudi Saint Jésus est l’invitant pour un repas qui commémore la

libération d’Égypte et annonce la Nouvelle Alliance entre Dieu et les hommes. Alliance qui sera

scellée le lendemain par sa mort sur la croix.

Ceci est mon corps, qui est pour vous, sous le signe du pain rompu et partagé.

Cette coupe est la Nouvelle Alliance en mon sang, qui est réellement versé. Le dernier repas terrestre de

Jésus qui annonce le repas éternel avec Dieu. Chaque fois que vous mangez ce pain et buvez à cette

coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne.

Jésus fera lui-même le lien entre ses repas terrestres et le repas des noces éternelles.

Après sa résurrection, particulièrement avec les disciples d’Emmaüs et au bord du lac avec 7apôtres

au retour de la pêche. Repas qui n’obéissent plus aux règles habituelles que nous connaissons.

Vous pensez bien que la réalité exprimée par l’Eucharistie dépasse infiniment le peu que je viens d’en

rappeler. Gardons présents à l’esprit

  • Elle assume d’abord toutes nos rencontres d’amitié véritable et de ce fait insiste sur la fraternité à construire inlassablement comme l’a fait Jésus en lavant les pieds de ses disciples.
  • Elle rappelle la proximité de Dieu au cours de notre histoire : qui aurait pu imaginer que nous
  • pouvons chaque semaine depuis 2000 ans nous asseoir à la même table que Dieu pour manger et
  • boire avec lui.
  • Elle nous offre par l’écoute et la conversation avec lui et nos frères de réajuster nos mentalités et
  • nos pratiques sur celles de Jésus. Elle nous assure que déjà nous sommes revêtus de la Robe
  • Nuptiale.
  • Elle nous garantit que l’invitation aux noces éternelles au-delà de la mort est réelle, fiable.
  • « Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau. »

Il n’est donc pas étonnant que le synode ait comporté beaucoup d’interventions autour de la messe,

des questions, des suggestions, des attentes fortes.

Je ne peux traiter tout cela dans le cadre d’une homélie. Je peux au moins affirmer que ces questions

sont légitimes, même si elles sont considérées comme « radicales ».

Sans attendre que les réformes souhaitées se mettent en place, nous pouvons nous recentrer sur

l’essentiel. (réformes qui relèvent de l’autorité et de chacun de nous !)

L’essentiel pourrait se résumer en « faites ceci en mémoire de moi ».

  • À chaque eucharistie nous avons à accueillir humblement l’Amour gratuit de Dieu. Un Amour qui
  • nous arrache dès aujourd’hui à la mort et au péché, en nous reconnaissant avec Jésus, fils et filles
  • de Dieu, à vivre dans la confiance en lui, à nous ajuster à lui pour que nous soyons nous aussi des
  • vivants selon Dieu, au service des autres dans un amour gratuit lui aussi. À offrir, remettre notre
  • humanité entre les mains du Dieu de Vie pour qu’il nous ressuscite à la suite de Jésus, avec Jésus.
  • Le 2ème essentiel. C’est une communauté qui célèbre, et non pas des individus qui accomplissent chacun pour soi un devoir dominical. Nous devons donc venir le dimanche le cœur tout rempli de
  • toutes les rencontres de la semaine, avec une attention particulière pour les blessés de la vie et les incroyants, être ensemble leurs représentants au pied de la croix.
  • Il me semble que si nous sommes habités par l’essentiel, il nous sera plus facile d’admettre qu’un
  • lecteur n’était pas au top, qu’un bouquet était de travers, que tel acteur de ce dimanche ne vient
  • pas les autres dimanches, que tel chant n’était pas à sa place et qu’on a chanté faux, que ce n’était
  • pas le prêtre qui a mes préférences !

Mais bien sûr ceci ne doit pas justifier la routine ou le « à peu près ».

Fête de la Trinité  à Anglure

Pourquoi se compliquer la vie en parlant de la Trinité, alors qu’il serait si simple de croire en un Dieu

unique sans plus (comme le pensent les musulmans).

Aujourd’hui c’est l’existence même de Dieu qui est niée par une part importante de la population.

La connaissance de la préhistoire a beaucoup progressé depuis notre enfance, il n’est pas inutile de nous mettre à l’écoute, même si les conclusions sont provisoires et révisables.

Il semble bien que la croyance en Dieu soit apparue avec l’homme lui-même :

  • Confronté à un monde qui s’imposait à lui, il s’est senti en présence d’un infini qui le précédait.
  • Expérimentant sa faiblesse et sa dépendance en présence de forces cosmiques il n’est pas étonnant
  • qu’il ait cru en la toute puissance, et qu’il ait cherché à se concilier sa faveur et sa force, pour
  • simplement pourvoir survivre et vivre.
  • L’énigme de la mort aussi a fait poser la question d’un au-delà de cette vie et de ce monde.

À partir du moment où l’homme (ou la femme ) a été en capacité de prendre conscience de lui-même et

de sa situation dans le monde par la pensée réflexive, ces questions l’ont habité. Et il n’avait à sa portée

que des réponses religieuses. Les réponses scientifiques qui nous habitent aujourd’hui n’étaient même

pas imaginables tant que les hommes n’avaient pas inventé et maîtrisé un minimum d’outils

d’investigation de la réalité (outils intellectuels et matériels).

Le développement scientifique n’a pas aboli les réponses religieuses. L’homme d’aujourd’hui se pose

toujours des questions comme celle-ci : « Comment se fait-il qu’il y ait quelque chose plutôt que rien. »

Sommes-nous seuls dans l’univers : dans le sens, y a-t-il des extra terrestres, mais aussi y a-t-il 

quelqu’un au-dessus de nous  » Notre existence a-t-elle un sens ou relevons-nous seulement du hasard ? « 

Nous constatons également la diversité des idées sur Dieu qui ont généré une grande diversité de religions.

Une diversité qui nous touche encore aujourd’hui même à l’intérieur d’une même religion.

Vient fatalement la question qui dit la vérité ? Une question qui n’est pas anodine car toute vision de Dieu a

des répercussions sur la vision de l’homme. La raison actuelle nous dit que certaines conceptions de Dieu

sont inacceptables. Les Aztèques (Amérique centrale) pensaient que faute de sacrifices humains la lumière

du soleil s’arrêterait. Faute de volontaires il fallait aller en chercher chez les peuples voisins  d’où des

guerres continuelles. Dans notre pays, personne (sauf quelques intégristes peut-être) ne supporte l’idée

d’un Dieu super-gendarme, justifiant le pouvoir politique, et imposant une morale totalement codifiée.

C’est dans ce paysage qu’apparaît l’originalité de la réponse chrétienne. Notre foi en Dieu est héritière et habitée par l’expérience d’un homme Jésus Christ, héritier du monothéisme juif.

Il se présente avec un lien étroit et original avec Dieu qu’il nomme familièrement « Papa ». Avec qui il passe

des heures, parfois même des nuits entières à parler avec une confiance sans limites.

Il prétend même être son porte-parole, et son porte-action grâce à son Esprit qui l’habite et inspire,

authentifie tout son être et toutes ses démarches.

C’est cette pratique et attitude de Jésus, son style original qui est à la source du « dogme de la Sainte

Trinité ». Le mot « dogme » difficile à utiliser aujourd’hui, mais qui dit simplement l’effort de

conceptualisation fait par les premières générations chrétiennes pour comprendre la nouveauté

opérée par Jésus. La nouveauté apportée par Jésus est de taille.

  • Par la parabole du père et des 2 fils ; il nous révèle un Dieu d’une générosité absolue et respectueux
  • de la liberté de ses enfants.

Par le lavement des pieds ; il inverse la pensée spontanée de l’homme, ce n’est pas l’homme qui est au

service de Dieu, mais Dieu qui se met au service de l’homme.

Par les multiples guérisons, Dieu veut remettre l’homme debout « lève-toi et marche ».

Par l’expulsion des esprits mauvais, il libère l’homme des esclavages intérieurs auxquels il consent si facilement.

  • C’est tout autre chose de croire en un Dieu qui se met sur pied d’égalité avec l’homme, se salit les
  • mains au contact du monde où il habite, et même se salit le cœur en fréquentant les pécheurs et les marginalisés.

Charles de Foucauld a cette expression magnifique « Jésus a tellement pris la dernière place que

personne n’a pu la lui ravir« . C’est tout autre chose de croire en un Dieu qui dicterait ses volontés du haut

du ciel, et auquel il n’y aurait qu’à obéir, et un Dieu qui « oblige » l’homme à inventer sa propre vie, en se reconnaissant enfant d’un tel père et frère et sœur de tous les hommes et femmes.

Ceci peut éclairer les affirmations de Jésus dans l’évangile de ce dimanche.

Quand il viendra, lui,  l’Esprit de vérité, il vous conduira vers la vérité toute entière.

Tout ce que possède le Père est à moi.

Voilà pourquoi je vous ai dit : l’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.

  • Chrétiens, nous avons cette chance de croire en un Dieu qui n’est pas un potentat solitaire et
  • insensible retranché derrière les étoiles.

Mais qui est un Père aux entrailles maternelles, au point de se donner totalement à nous en Jésus Christ,

nous rend capables d’aimer par son Esprit répandu sur toute chair.

Par lui nous pouvons accéder à une pleine humanité en devenant ses enfants.

Cela vaut la peine de lui rendre grâce.

Fête de la  Pentecôte 2022 à Sézanne

Le mot « Pentecôte » n’a pas encore disparu du vocabulaire de notre pays, pour la raison bien simple

que ça nous vaut un jour de congé supplémentaire.

Ce n’est pas pour autant que l’Esprit Saint soit une préoccupation pour tous ceux et celles qui profitent

de ce jour de congé.

  • Ma réflexion de ce jour va s’appuyer davantage sur la lettre de saint Paul plutôt que sur le récit de
  • saint Luc.

Saint Paul oppose « la Chair à l’Esprit ». Cela mérite quelques précisions !

« Vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair, mais sous celle de l’Esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en

vous. » Le risque est grand à la lecture de saint Paul de faire une équation sommaire :

chair         Corps         péché. Si en plus on ajoute le mot sexe c’était l’horreur absolue avec les conséquences

que nous connaissons. Rappelons tout d’abord que dans la culture biblique le mot chair peut avoir 2 significations :

1 – L’homme dans sa condition terrestre, tel que l’expérience immédiate nous le fait appréhender.

Petit ou grand, homme ou femme, dégourdi ou limité, blanc ou noir.

2 – L’homme centré sur lui-même marqué par l’égoïsme, l’esprit de jouissance, l’orgueil, refusant

la transcendance. C’est dans ce 2e sens que saint Paul nous dit : Ceux qui sont sous l’emprise de la chair

ne peuvent pas plaire à Dieu.

Quelle que soit notre emprise de la chair, nous ne pouvons pas nous passer de notre corps, puisque nous n’existons qu’à partir de notre corps.

Les propos de saint Paul ne peuvent justifier le moindre mépris du corps : le corps, au sens où nous

l’entendons aujourd’hui est inséparable de l’Esprit.

  • Il est sorti de la main du Dieu créateur, il a donc la même valeur et la même dignité que notre Esprit : « Notre Âme », dans le vocabulaire d’aujourd’hui.
  • Chrétiens nous avons une raison particulière d’avoir de l’estime, du respect et de l’admiration pour lui puisque le Fils unique de Dieu a reçu un corps en tout semblable au nôtre de la Vierge Marie. Saint Jean
  • a cette affirmation inouïe « Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous. »
  • Et c’est dans son corps que Jésus est ressuscité, et qu’il est présent dans la gloire du Père, siégeant à sadroite, c’est-à-dire dans une égalité de nature et de dignité avec lui. La nouvelle traduction du
  • symbole de Nicée nous demande de réapprivoiser le mot « consubstantiel » au Père.

Ceci a d’énormes conséquences pour nous chrétiens.

Dieu ne nous est accessible en vérité que par la rencontre avec l’homme Jésus.

Saint Jean continue : Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, plein de

grâce et de vérité, qu’il tient de son Père.

En Jésus, on a pu voir, toucher, entendre Dieu.

C’est par des paroles humaines que nous avons pu entrevoir le mystère de Dieu, d’où l’importance des paraboles. Les auditeurs des apôtres ne s’y sont pas trompés, dans la diversité de leur appartenance

ethnique. « Tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu« .
C’est au toucher d’un homme que les paralysés se sont remis debout, que des aveugles ont retrouvé la

vue et des sourds muets la parole. La fille de Jaïre s’est relevée de son lit de mort lorsque Jésus l’a prise

par la main. C’est à partir de notre expérience corporelle que nous pouvons construire et vivre notre

expérience spirituelle. Un enfant pourrait-il croire en l’amour de Dieu, s’il n’a pas été bercé, embrassé,

caressé ? dans le respect absolu de son intégrité physique. Les difficultés à croire en la vie et en Dieu

dont témoignent les personnes victimes de pédocriminalité le démontrent a contrario.

Les sacrements sont des gestes d’homme qui actualisent les gestes de Jésus.

Plongés dans l’eau du baptême, nous sommes entraînés dans la mort et résurrection de Jésus.

Partageant le pain et le vin, corps et sang de Jésus nous devenons nous aussi corps et sang du Christ.

Marqués de l’huile sainte nous recevons la force et l’endurance pour nos tâches d’hommes et de femmes,

notre mission dans l’Église, et la patience et le courage dans la maladie.

C’est par nos gestes fraternels que nous bâtissons le royaume de Dieu sur cette terre et notre place dans

la vie éternelle : J’avais faim et tu m’as donné à manger. J’étais dans le besoin et tu m’as secouru.

J’étais seul ou abandonné et tu es venu jusqu’à moi.

Saint Paul insiste : Si le Christ est en vous, le corps, il est vrai, reste marqué par la mort à cause du péché.

Mais l’Esprit vous fait vivre, puisque vous êtes devenus des justes.

C’est dans notre vie corporelle, c’est par notre condition corporelle que nous pouvons nous ajuster à l’humanité de Jésus.

J’ai le souvenir, rentrant d’Équateur, d’avoir entendu un pratiquant me tenir un discours religieux,

totalement désincarné, d’une spiritualité artificielle. N’y tenant plus, je lui ai dit  » Votre discours m’est totalement étranger, je suis matérialiste ».

La réaction : « C’est bien la première fois que j’entends un prêtre dire ça. »

Ma réponse qui a clôt le débat : « Je crois en un Dieu qui s’est fait homme en Jésus Christ, comment

pourrais-je oublier que j’ai un corps ? Et ne pas prendre au sérieux le monde matériel. »

 J’emprunterai la conclusion encore à Saint Paul :

Si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous,

celui qui a ressuscité Jésus, le Christ, d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son

Esprit qui habite en vous. Pour Dieu le corps et l’Esprit sont appelés à faire bon ménage. Ne séparons

pas ce que Dieu a uni et  travaillons en nous à une collaboration pacifiée de l’un avec l’autre.

 

7e dimanche de Pâques 2022  à Sézanne

Le temps entre l’Ascension et la Pentecôte.

Jésus n’est plus avec les disciples et l’Esprit Saint n’a pas encore été répandu sur eux en abondance où ils seront guéris de toute peur, éclairés sur la personne même de Jésus, sortis du doute en quelque sorte, conscients de la mission qui leur est confiée.

Un temps de disette pourrait-on dire qui n’est pas sans ressemblance avec ce que nous vivons présentement :

Le temps où les églises étaient pleines, où il y avait un prêtre dans chaque village, où tous les enfants allaient au KT, selon les expressions populaires utilisées en permanence.

Nous sommes tous conscients que ce temps est derrière nous et qu’il ne reviendra pas (même si certains le pensent !). Mais nous ne savons pas encore vers quoi nous allons.

Ce passage à vide ne serait-il pas nécessaire pour nous rendre totalement disponibles à ce que Dieu

prépare pour notre monde. Je m’arrête un peu sur la suite du récit des Actes aussitôt le départ de Jésus.

Le premier réflexe des disciples c’est de se retrouver ensemble les 11 survivants de l’aventure « Jésus »

qui se termine, avec Marie et quelques femmes et avec les frères de Jésus (il faut donc penser que

quelques proches de sa

famille avaient fini par croire en lui).

  • Tous, unanimes (réunis dans la chambre haute, on a vite fait le compte : autour de 20 personnes)
  • ils étaient assidus à la prière. C’est le réflexe de survie : Puisque Jésus les a quittés pour retourner
  • dans la Gloire du Père. Le seul moyen de rester en contact avec lui,

c’est la prière et l’amour fraternel.

Ce fut l’exemple et le message de Jésus lors du repas d’adieu, la veille de sa mort : Les yeux levés

au ciel, Jésus priait ainsi : Père Saint, je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, mais encore pour

ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi.

Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi.

Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé.

  • Même si nous ne savons pas par quel bout prendre l’évangélisation du monde d’aujourd’hui,
  • 2 choses nous restent accessibles, porter dans la prière nos proches et le monde dans lequel nous
  • vivons, et aimer nos frères et sœurs chrétiens.
  • Quand Étienne est rejeté par ses coreligionnaires qui poussent de grands cris, se bouchent les
  • oreilles, l’entraînent hors de la ville pour le lapider, il est évident qu’il est totalement démuni
  • pour faire quoi que ce soit pour eux. Il prie « Seigneur Jésus, reçois mon esprit« .

Et il choisit d’aimer jusqu’au bout : « Seigneur ne leur compte pas ce péché. »

Ce qui fut l’attitude de Jésus sur la croix.

  • La prière et la vie fraternelle, ne sont pas là pour nous consoler de l’échec de l’évangélisation, du désintérêt de la religion autour de nous. C’est nous recentrer sur l’essentiel, sur la source même de l’évangélisation. Dans l’Évangile, Saint Jean continue :

Qu’ils deviennent ainsi parfaitement un, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as

aimés comme tu m’as aimé.

L’Évangélisation repose sur les hommes et les femmes que nous sommes, qui dans leur faiblesse ont

reconnu que tu m’as envoyé. Que Dieu a envoyé Jésus comme témoin et acteur de l’Amour de Dieu

pour tous les hommes.

Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître, pour que l’Amour dont tu m’as aimé soit en eux,

et que moi aussi, je sois en eux.

  • C’est ce qu’a vécu avec une radicalité totale Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, qui est devenue
  • patronne des missions sans avoir jamais quitté les 4 murs de son Carmel. Elle qui nous disait si
  • l’Amour s’éteint dans les cœurs, les missionnaires refuseront de marcher, les martyrs de verser
  • leur sang, les prophètes d’annoncer. Vous pouvez allonger la liste. Les parents de transmettre à
  • leurs enfants, les appelés de répondre à leur vocation, les engagés de bâtir un monde meilleur.

Ceci rappelé, les 11 ne sont pas restés inactifs pour autant. À l’initiative de Pierre il va réunir 120

personnes environ pour remplacer Judas. C’est parmi ces 120 que l’assemblée va rechercher les

personnes compétentes. Pierre s’appuie sur 3 points : a) la méditation des Écritures ; il inscrit donc

cette action dans l’histoire de la révélation. b) la prière. c) le tirage au sort, pour laisser Dieu choisir le

12e témoin de la résurrection, comme eux-mêmes ne s’étaient pas portés volontaires, mais ont été

choisis par Jésus lui-même. Ce faisant Pierre va guérir la communauté de la blessure imposée par la

trahison de Judas, et qu’avec le 12e, l’Église retrouve le visage voulu par Jésus Christ.

  • Nous aujourd’hui, invités, appelés à participer au Synode, n’est-ce pas du même ordre que ce
  • qu’ont fait les 120 à l’initiative de Pierre.

Nous avons tenté par la parole de tous, de regarder et dire les blessures de notre église, il nous reste à

apporter des remèdes pour que l’Église retrouve le visage de Jésus Christ pour le XXIe siècle.

Je ne pense pas que l’élection de Mathias comme 12e apôtre ait fait beaucoup de bruit à Jérusalem,

mais il fallait le faire.

Aujourd’hui beaucoup de chrétiens là où ils vivent travaillent le plus souvent loin des caméras et des

micros. C’est ce travail qui redonne vie à l’Église, et prépare les moissons futures. Toutes les formes d’accompagnement pour les obsèques, les baptêmes, mariages, le travail auprès des enfants et des

jeunes, les engagements professionnels, culturels, sociétaux sont autant de lieux où l’Amour de Jésus

Christ est diffusé. Il me semble qu’il y a urgence à ce que toutes ces initiatives discrètes trouvent un lieu d’expression et de partage pour nous encourager mutuellement et faire ensemble le chemin.

Fête de l’Ascension 2022 à Esternay

Que peut-on dire en ce début du XXIe siècle sur l’Ascension ?

Que peut signifier pour nous « emporté au ciel » dans un monde où le ciel n’est plus que le vide où les

hommes envoient des satellites et des fusées et où ils commencent à accumuler des déchets.

Lorsque ces textes ont été écrits, le ciel est par essence inaccessible, dépasse l’homme infiniment,

il est dans l’ordre symbolique, religieux le lieu par excellence où Dieu est présent inaccessible aux

hommes : puisque nous ne pouvons pas penser en dehors de la notion de temps et de lieu, sur cette

terre nous ne pouvons pas penser le spirituel sans la dépendance du temporel et du matériel.

Notre langage sera toujours imparfait.

Lorsque les textes ont été écrits (dans la seconde moitié du 1er siècle) Jésus n’est plus avec ses

disciples, bien qu’il ait affirmé : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

Je ne serais pas étonné que bien des chrétiens soient pris entre la confiance et le doute, entre la

certitude de la lumière et l’obscurité des ténèbres.

Le Royaume des Cieux dont Jésus a proclamé la venue, se fait attendre. Le souvenir des miracles,

des guérisons en témoigne, un souvenir heureux peut devenir douloureux si la réalité est contraire.

La prédication apostolique a multiplié le nombre des disciples, mais provoqué aussi du refus,

des rejets et même des persécutions.

Le temple où avait retenti la parole de Jésus, où les apôtres et les premiers disciples ont continué

de prier et d’enseigner a été détruit par les armées romaines. Le temple qui était le signe imposant

de la présence de Dieu à son peuple !

Je pense aussi, que la mort de Jésus sur la croix reste un scandale, difficile à intégrer dans une vision

de salut même après la résurrection. Saint Paul témoigne de ce scandale, de cette difficulté.

Nous sommes aujourd’hui dans une situation instable.

Peut-on encore se réclamer de Jésus, suivre Jésus, après le scandale de la pédocriminalité dans

l’Église, dans le toujours présent de l’effacement de l’Église comme institution dans notre société

développée. Jésus ne ferait-il pas le poids face au confort et au prêt-à-penser des médias ?

Avec la guerre en Ukraine nous redécouvrons la force du mal qui n’a jamais cessé sur notre terre.

L’incapacité des hommes à régler les problèmes qui menacent l’existence même de l’humanité :

Le changement climatique, la pollution, la faim, la course aux armements, les économies

mafieuses. Pouvons-nous encore nous fier à cette parole de Jésus « Je suis la lumière du monde« .

Les textes de la Parole de Dieu peuvent encore nous éclairer aujourd’hui.

Lors des apparitions Jésus a montré ses plaies non seulement à Thomas mais aussi à tous les autres :

ceci nous rappelle qu’on ne peut séparer les deux temps du salut. C’est en assumant et traversant

la souffrance et la mort que la vie peut triompher.

Cela n’est pas vrai seulement pour Jésus. C’est vrai pour tout croyant.

Abraham est devenu le père d’un grand peuple alors que son couple était stérile.

Ce peuple choisi par Dieu a connu l’esclavage en Égypte.

40 ans de traversée du désert avec la faim, la soif, l’affrontement avec des peuples hostiles.

Une première destruction du temple de Jérusalem par Nabuchodonosor et l’exil à Babylone.

L’invasion grecque et romaine avant la venue de Jésus.

L’histoire du peuple de Dieu, l’histoire de Jésus se trouvent en cohérence profonde. Aussi l’Évangile

n’hésite pas à dire : Jésus ressuscité, apparaissant à ses disciples, leur dit : « Il est écrit que le Christ

souffrirait » et la lettre aux Hébreux : Le Christ s’est offert une seule fois pour enlever les péchés de

la multitude.

Les épreuves d’aujourd’hui ne sont pas dues au fait que Dieu nous aurait abandonnés.
Notre premier réflexe de survie, c’est de faire mémoire de la présence de Jésus au milieu de nous :

une présence bienveillante et porteuse de vie par toutes les guérisons qu’il a faites.

Le faire mémoire de sa mort qui pourrait paraître un échec complet, Jésus en a fait le lieu d’un amour

total, gratuit, sans retour sur lui-même. Il en a fait le lieu de l’affrontement victorieux contre toutes les

forces du mal. C’est bien pourquoi il nous a donné en mémoire de lui, le repas fraternel qui rassemble

encore aujourd’hui ses disciples.

La résurrection de Jésus est l’authentification par Dieu son Père, de l’infini de l’Amour voilé par les

souffrances de sa passion.

S’il nous quitte physiquement ce n’est pas pour nous abandonner. Mais d’abord pour que son humanité blessée participe totalement à la gloire de Dieu en son nom personnel bien sûr, mais par anticipation en

notre nom à tous et toutes. Par l’Esprit Saint la présence spirituelle de Jésus s’étend à toute l’humanité.

Vous allez recevoir une force quand l’Esprit Saint viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à

Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre.

L’Épître aux Hébreux confirme notre foi-confiance :  « C’est avec pleine assurance que nous pouvons

entrer dans le véritable sanctuaire grâce au sang de Jésus : nous avons là un chemin nouveau et vivant

qu’il a inauguré en franchissant le rideau du Sanctuaire. Le rideau du Sanctuaire représente à la fois le

passage par la mort et le passage de la terre au ciel.

Enfin notre attachement à Jésus Christ s’appuie sur la fiabilité même de Jésus que les 2 envoyés du

ciel rappellent aux apôtres.

 » Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ?

Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu  

  s’en aller vers le ciel. »

Que le Christ ressuscité réoriente notre regard vers la terre, et nous donne le regard de Dieu lui-même

sur nous-mêmes, sur nos frères et sœurs, sur le monde.

 6e dimanche de Pâques 2022  à Courcemain

Je ne pense pas que beaucoup étaient à l’Épine le 8 mai où était présenté un résumé de la

consultation synodale.

Je n’ai pas à le faire maintenant. Ce serait trop long et une publication éditée par le diocèse

(papier et virtuel) le fait mieux que moi.

Par contre, il me paraît essentiel de rappeler que ladémarche synodale garde toute son actualité et

doit devenir un réflexe de tout chrétien, une caractéristique majeure de toute communauté

chrétienne, si petite soit-elle.

Tout simplement parce qu’on ne peut pas être chrétien tout seul. Et parce que la participation

des chrétiens à la vie de l’Église, n’est pas « pour aider monsieur le curé » mais une conséquence

du baptême et confirmation.

Le ministère est au service de la vocation baptismale et non l’inverse.

C’est à tous ses disciples et pas simplement aux 12 que Jésus adresse cette parole :

Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ;

Mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui,

et chez lui, nous nous ferons une demeure.

Le ministère des 12 continué dans le ministère des évêques, fragmenté dans le ministère des

prêtres et des diacres a d’abord pour mission de maintenir l’unité des croyants, et de dynamiser

de l’intérieur la foi des chrétiens pour qu’ils restent fidèles à la démarche de Jésus.

Les Actes des Apôtres, en nous racontant l’Assemblée de Jérusalem nous éclairent sur les défis

d’aujourd’hui.

Comme croyants on ne démarre pas de zéro.

Après le départ de Jésus, l’Église primitive a dû faire une synthèse originale entre tradition et

invention.

  • Jésus avait amorcé la chose pourrait-on dire : Éduqué dans la foi juive il va assumer la méditation
  • des Écritures et les pratiques religieuses en cours. Il sera lui-même circoncis selon la loi de Moïse,
  • présenté au temple et « racheté » à 40 jours. À partir de l’adolescence il montera chaque année à Jérusalem pour les grandes fêtes, assidu de la synagogue de son village les samedis (sabbat).

Jésus était un Juif pratiquant fidèle.

Et en même temps, il va ouvrir les 12 et ses disciples à l’universel en guérissant l’esclave d’un centurion

romain, la fille d’une cananéenne et c’est en terre païenne « Césarée de Philippe  » que Jésus dit à Simon

« Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église« .

  • Le défi majeur des premières communautés chrétiennes est situé clairement par les premiers
  • chrétiens : des Juifs de Judée qui disent : « Si vous n’acceptez pas la circoncision selon la
  • coutume qui vient de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés ».

Or les païens de l’empire gréco-romain, le monde connu d’alors, étaient allergiques à la circoncision

au point que saint Paul rencontrera dans ses voyages des sympathisants qui ne franchissent pas

l’obstacle de l’adhésion totale, et surtout des femmes qui n’ont pas cet obstacle.

Très vite la question se pose, que faut-il garder ou abandonner de la tradition pour libérer la parole

de Dieu et faciliter la foi en Jésus Christ ?

C’est exactement notre problème d’aujourd’hui.

Les Actes nous donnent une méthode pertinente.

  • D’abord avoir le courage de mettre le problème sur la table, et permettre l’expression de tous,
  • en prenant même le risque d’affrontement.

Cela provoqua un affrontement ainsi qu’une vive discussion engagée par Paul et Barnabé contre

ces gens-là.

  • Ensuite de ne pas s’enfermer au niveau des 2 parties en conflit, et de s’ouvrir à une médiation
  • extérieure. Ceci suppose l’accord des 2 parties (si chacun compte sur ses convictions sans s’ouvrir
  • à l’autre, la situation reste bloquée).

Alors on décida que Paul et Barnabé, avec quelques autres frères, monteraient à Jérusalem auprès des

Apôtres et des Anciens pour discuter de cette question.

  • De fait la discussion va reprendre à Jérusalem : entre Antioche et Jérusalem 500 km environ à
  • pied, ça donne le temps de relativiser son point de vue.

Mais surtout il est ajouté un élément nouveau (qui est omis dans la lecture) Paul raconte l’accueil

des païens dont la communauté de Jérusalem ne savait rien.

Pierre rappelle le baptême du Centurion Corneille à Césarée qui lui avait été aussi reproché en son

temps. Par ces récits on sort de la démarche idéologique qui défend des idées et on passe à une

fidélité à la réalité qui est maîtresse de vie.

C’est l’attitude majeure du pape François (qui lui est reprochée par des milieux traditionalistes).

  • Enfin on aboutit à un compromis. La circoncision qui aurait condamné les chrétiens à rester
  • une secte est abandonnée et en même temps, il est demandé par respect pour ces Juifs
  • convaincus, de s’abstenir des viandes non saignées et des unions illégitimes qui se trouvent
  • dans le Lévitique. Et par respect pour les ex-païens : s’abstenir des viandes offertes en sacrifice
  • aux idoles et du sang (des spécialistes pensent qu’il s’agit de tout homicide).

Dans les 2 prescriptions il y a un enjeu spirituel très fort. Il s’agit d’affirmer qu’il n’y a pas d’autre Dieu

que celui qui est révélé par le peuple juif et manifesté en Jésus Christ, et de rappeler que toute vie

appartient à Dieu, que l’homme est au service de la vie.

Le synode dans sa première phase de consultation, serait une opération inutile s’il ne se continue pas

dans la vie concrète des communautés chrétiennes.

Il nous faudra apprendre à nous mettre ensemble pour voir et décider de ce qui est bon et faisable pour

notre propre communauté.

Il nous faudra rester en lien avec les autres communautés par la présence fraternelle et encourageante

des ministres ordonnés. Mais aussi par des initiatives d’échanges avec d’autres communautés.

Il faudra donc que ces fonctionnements, déjà engagés soient animés par la prière personnelle et

collective : l’Eucharistie quand ce sera possible mais « pas que ».

 

PS : Par Communauté chrétienne, j’entends tout groupe qui se réclame de Jésus Christ, ne serait-ce

que 2 ou 3 selon les chiffres donnés par Jésus lui-même.

 5e dimanche de Pâques 2022  à Esternay

Avant d’aborder les textes de ce dimanche

Il me semble qu’on ne peut passer à côté de la « canonisation » de Charles de Foucauld, un peu à cause

du fait qu’il a été dans sa jeunesse en garnison à Montmirail, où il a brillé par sa mauvaise conduite,

mais surtout parce qu’il a marqué profondément notre temps, après sa conversion et particulièrement

l’Église de France.

  • D’abord sa conversion a été l’aboutissement de tout un processus qui a commencé par le contact de musulmans qui priaient. Un exemple qui peut interpeller notre regard sur les musulmans.
  • À nous de ne pas les voir comme des concurrents ou un danger pour notre foi. Mais comme des
  • frères et sœurs qui nous demandent fidélité et dynamisme dans notre foi en Jésus Christ.
  • Il serait aussi injuste d’identifier musulman et djihadiste que d’identifier chrétien et colonialiste.
  • Ensuite parce que sa spiritualité de frère universel a influencé profondément l’Église de France
  • qui est passée d’une attitude de domination et de conquête au début du XXe siècle a une attitude
  • de présence fraternelle au milieu des indifférents et des athées. Les prêtres ouvriers, les petites communautés de religieuses dans les quartiers sensibles, la Mission de France se réclament de lui.

On lui doit des figures chrétiennes comme sœur Odette Prévost, Madeleine Delbrêl, Jacques  Loew.

Beaucoup de chrétiens anonymes, même sans lien particulier avec lui, ont grâce à lui vécu leur foi sans ostentation et avec conviction dans leur milieu professionnel, social, associatif (pas seulement à l’Église).

Abordons maintenant les textes de ce jour :

Ce qui frappe au départ, c’est le mot GLORIFIER utilisé 5 fois en quelques lignes. La gloire de Dieu

dont parle Jésus et qu’il revendique pour lui-même et Dieu son Père n’a rien à voir avec la gloire de

messieurs Poutine, Xi Jinping, Kim Jong-un, qui se glorifient de la puissance de leur armée et de la

peur ou fascination qu’ils inspirent au monde entier.

Dans la Bible, le mot gloire indique la valeur réelle d’une personne, le poids qu’il ou qu’elle pèse en

face des autres. Ce qui manifeste, dans ses actes et ses paroles, la vérité de son être.

Dans cet Évangile Jésus est entré dans sa passion. Il indique donc à ses disciples que c’est par sa mort et résurrection que lui-même et Dieu son Père se manifeste aux hommes en vérité. Le mot Gloire est donc inséparable de sa reconnaissance comme Messie aux Rameaux, mais tout autant du lavement des pieds

de ses disciples. Sa patience face à ses bourreaux, le pardon donné sur la croix, et le relèvement des

disciples après sa résurrection.

C’est à travers tous ces évènements que Dieu se manifeste en vérité à tous les hommes :

Dieu est totalement Don de lui-même en son Fils. Il est Don dans la gratuité absolue et l’humilité.

Il est Don pour faire vivre son Fils et à travers lui faire vivre toute l’humilité.

C’est bien à travers une vie d’homme que le Dieu inaccessible devient proche.

C’est par une vie de service, d’humilité, de gratuité que le Dieu tout puissant purifie notre

regard limité sur lui, guérit nos cœurs blessés qui ne cessent de déformer son visage.

Il y a donc une logique interne et nécessaire entre la « glorification » dont parle Jésus et

le commandement nouveau : Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

  • Ayons conscience que par le baptême nous entrons dans cette dynamique de reconnaissance
  • mutuelle et d’échange d’Amour qui caractérise la foi chrétienne. Baptisés au nom du Père, du
  • Fils et du Saint Esprit nous sommes plongés dans la Sainte Trinité, Océan d’Amour infini.

Nourris du Corps du Christ au cours du repas du Seigneur, notre humanité devient l’humanité du

Christ continuée aujourd’hui, elle devient une humanité, structurée dans le don de nous-mêmes.

Abreuvés du Sang du Christ notre vie, notre sensibilité deviennent la vie la sensibilité de Jésus.

  • Le commandement de nous aimer les uns les autres existait déjà dans la 1re Alliance et il était
  • déjà enfoui au cœur de tout homme. Ce qui est « vraiment nouveau » et le restera jusqu’à la fin
  • du monde : C’est le (mot) « Comme je vous ai aimés« .

Personne dans toute l’histoire de l’humanité n’a aimé avec la radicalité de l’Amour de Jésus, qui a

aimé dans le don total de lui-même. Et lui seul peut nous donner cette capacité d’aimer avec la même

qualité que lui. Car tout Amour humain est marqué par la fragilité et l’insuffisance !

La sainteté pour un chrétien, n’est rien d’autre que d’accepter de prendre ce chemin avec la certitude

de ne jamais atteindre l’idéal, Charles de Foucauld en est un bon exemple.

 

Le texte de l’Apocalypse n’est pas étranger à cette réflexion sur la Gloire de Dieu qui rend la vie aux

hommes par le don de lui-même en Jésus Christ.

Le Ciel Nouveau et la Terre Nouvelle n’a plus de mer, qui est, dans la culture biblique l’empire du mal et

de la mort, qui ont disparus.

La ville nouvelle est donnée directement par Dieu aux hommes, précisément en venant demeurer

parmi nous : Par sa présence, une présence où la priorité absolue c’est de Aimer divinement

Dieu essuiera toute larme de nos yeux

La mort ne sera plus, il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur.

Avec Jésus ressuscité Dieu fait réellement toutes choses nouvelles.

Par l’amour que nous avons les uns pour les autres, nous donnons réalité dès maintenant à ce projet de

Dieu de faire toutes choses nouvelles.

Ce qui apparaîtra en pleine lumière lorsqu’à son retour glorieux, Jésus pourra nous dire :

J’ai eu faim, soif et vous m’avez donné à manger et à boire

J’étais nu et vous m’avez vêtu

J’étais étranger et vous m’avez accueilli

J’étais malade ou prisonnier et vous êtes venus jusqu’à moi.

Jésus lui-même nous donne la conclusion :

À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples :

Si vous avez de l’amour les uns pour les autres.

Comment un disciple du Christ pourrait ne pas aimer ?

 

4e dimanche de Pâques  Anglure

Ce 4e dimanche de Pâques est appelé habituellement « dimanche du Bon Pasteur ».

Il n’est pas inutile de rappeler que Jésus est le seul Pasteur de plein droit.

C’est lui qui est venu au nom de Dieu son Père pour conduire l’humanité et chacun de nous, à

la plénitude  de la vie :

Mes brebis écoutent ma voix, je les connais et elles me suivent.

Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, et personne ne les arrachera de ma main.

L’apocalypse de Saint Jean nous assure de la réussite de ce projet de Dieu.

Celui qui siège sur le Trône (Dieu) établira sa demeure chez eux. Ils n’auront plus faim, ils n’auront

plus soif, ni le soleil, ni la chaleur ne les accablera, puisque l’Agneau qui se tient au milieu du Trône,

sera leur pasteur pour les conduire aux sources des eaux de la vie.

Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux.

Dans ces temps bouleversés que nous vivons au niveau social, politique, intellectuel et religieux, nous

avons besoin de nous appuyer sur quelqu’un de solide : pour nous chrétiens, sur Jésus qui nous garantit

la bienveillance de Dieu pour nous.

Il ne s’agit pas de nous évader, de nous mettre à l’abri des difficultés, des blessures des incertitudes

de la vie présente. Mais de trouver le point d’ancrage solide qui nous permette d’affronter précisément

ces difficultés, remplis d’espérance, habité par la lumière de Dieu qui éclaire notre cœur et notre route.

Paul et Barnabé ont vécu cela tout au long de leur ministère et particulièrement à Antioche de Pisidie

(au centre de la Turquie actuelle).

Le refus primitif de la part des Juifs les fait se tourner vers les païens, par deux fois il nous est dit

« Les païens étaient dans la joie et rendaient gloire à la Parole de Dieu« .

« Les disciples étaient remplis de joie et d’Esprit Saint« .

Les difficultés que rencontre l’Église ne devraient pas nous accabler mais nous stimuler.

C’est peut être un signe de Dieu que l’on entend souvent l’expression « disciples missionnaires« .

Je ne serais pas étonné que ce soit un appel à regarder plutôt les besoins et les attentes de nos

contemporains plutôt que nos difficultés.

Ceci rappelé, il ne faut pas pour autant demander à Dieu de faire le travail à notre place. Jésus nous accompagne mais c’est à nous, collectivement, ses disciples de continuer son œuvre avec humilité et conviction.

Ce dimanche du Bon Pasteur est devenu le dimanche des vocations, avec le risque aujourd’hui de limiter

le mot vocation aux prêtres, diacres, religieuses.

De par notre baptême, nous sommes tous appelés par Jésus à marcher à sa suite et pas seulement

quelques privilégiés(es) mis à part.

Nous ne pouvons pas effacer l’histoire, nous héritons d’une longue période où la société avait été

modelée par la foi chrétienne. Ce que nous avons appelé la chrétienté. Le personnel religieux était

nombreux. Évêques, prêtres, moines et moniales occupaient une place prépondérante dans la société.

Sous l’influence de la renaissance (XVIe) de la philosophie des lumières (XVIIIe) de l’essor des sciences

(XIX – XXe) tout cela a volé en éclat. Pour arriver à la société sécularisée que nous connaissons

aujourd’hui, avec, ce à quoi nous sommes sensibles : la disparition du clergé et des religieuses.

La fin de la chrétienté n’est pas la fin de l’Église.

Essayons d’y voir un peu plus clair.

Si vous avez la curiosité d’ouvrir le Nouveau Testament, le mot « Église » n’est prononcé que 3 fois dans

le seul évangile de saint Mathieu, et 100 fois dans le reste du Nouveau Testament. Cela devrait nous alerter.

Jésus a réuni autour de lui le groupe des 12, avec une responsabilité particulière pour Pierre.

Ce qui veut dire que Jésus a laissé une grande autonomie à ses disciples et parmi eux des responsables

pour établir des communautés dans l’unité et la diversité.

La première mise en œuvre de cette responsabilité dans la liberté, sera l’institution des 7 dans l’Église de Jérusalem. Les 7 appelés habituellement les « diacres » qui n’ont guère de commun avec les diacres

aujourd’hui. Il est d’ailleurs remarquable qu’ils ont été choisis pour le service des tables, et l’on retrouve Étienne prédicateur//contestateur des autorités religieuses de Jérusalem et Philippe accompagnateur

spirituel du ministre des finances de la reine d’Éthiopie.

 

À mon sens, l’urgence pour l’Église aujourd’hui n’est pas d’abord d’augmenter le nombre de prêtres,

mais de valoriser la vocation de tous les baptisés. Que chaque baptisé se sente responsable de l’avenir

de l’Église en raison de sa fidélité à Jésus Christ. Cette mutation est d’ailleurs en cours (je rappelle que

c’est la raison d’être du Synode qui a pour but la réforme de l’Église.) Je cite quelques réalisations. La commission Sauvé, qui ne comportait aucun prêtre, ni religieuse, a fait beaucoup pour la réforme

de l’Église.

La renaissances du Mont des Cadres et dirigeants Chrétiens a un impact très fort sur l’évolution positive

des entreprises.

Le campus de transition fondé par Cécile Renouard, dans une propriété des religieuses de l’Assomption

en Seine et Marne (77) pour former des responsables économiques, politiques, associatifs à la transition écologique.

Sans oublier bien sûr, toutes les initiatives solidaires dans les paroisses.

Ces initiatives de laïcs, en lien avec des responsables d’Église (Évêques, prêtres) forment déjà la

physionomie renouvelée du ministère presbytéral épiscopal.

Ces initiatives ont quelques points communs entre elles : elles sont effectivement ouvertes sur les

défis de notre société//ouvertes à d’autres que les chrétiens//sans prosélytisme//se référant

explicitement à Jésus Christ.

Le Ministère retrouve alors toute sa pertinence : assurer l’unité de la diversité et maintenir vivante

l’adhésion à Jésus Christ.

 

3e dimanche de Pâques à Saron

Les textes propres à notre méditation vont dans tous les sens.

Il n’est pas évident de trouver une cohérence entre eux, un fil rouge qui donne une unité à notre réflexion.

Une réalité fait leur unité, la résurrection de Jésus. C’est bien là le centre de notre foi, qui modèle toute

notre vie.

Avec le récit des Actes, nous touchons au point sensible de l’accueil non seulement de la foi chrétienne,

mais aussi de l’attitude vis-à-vis des chrétiens.

  • Les autorités juives, le grand prêtre, le Conseil suprême ont rejeté Jésus ; en toute logique ils veulent
  • faire taire les disciples.

« Nous vous avions formellement interdit d’enseigner au nom de celui-là ». Ils cherchent même à les

culpabiliser, à les rendre responsables des troubles.

Vous voulez donc faire retomber sur nous le sang de cet homme, alors que ce sont ces mêmes autorités

qui ont dit devant Pilate : « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants« .

  • Comment réagissent Pierre et les apôtres

S’adressant à des autorités religieuses, ils peuvent dire : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. »

C’est un argument  qu’ils ne peuvent réfuter mais inefficace dans une société sécularisée comme la nôtre.

Nous il faut trouver d’autres arguments (comme l’adhésion à la devise républicaine)

Face à la tentative de culpabilisation, d’inverser la responsabilité. Pierre et des disciples rappellent la vérité :

Le Dieu de nos pères a ressuscité Jésus, que vous aviez exécuté en le suspendant au bois du supplice.

  • Pierre et les disciples redisent clairement ce qui les habite : Nous sommes témoins de tout cela :
  • C’est lui que Dieu a élevé, en faisant de lui le Prince et le Sauveur, pour accorder à Israël la conversion
  • et le pardon des péchés.

Devant la détermination des disciples, les autorités ne peuvent qu’interdire et menacer avec coup de fouet à l’appui.

Mesures inefficaces, dérisoires même, car les pouvoirs de cette terre ne font pas le poids, face au pouvoir

de la résurrection. Ils repartaient tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom

de Jésus.

Dans notre monde où notre foi est contestée, où l’on cherche parfois à nous faire taire, et qu’on cherche

aussi

à nous rendre coupables de tous les maux de notre terre, la dynamique de ce texte peut nous être précieuse

et utile.

Avec le texte de l’Apocalypse une démarche qui ne nous est pas familière nous avons un complément du

texte des Actes.

Lorsque l’on est dans le feu de l’action, dans les débats sans cesse renouvelés de la contestation,

on risque de perdre de vue ce vers quoi nous allons. La résurrection de Jésus, la foi des chrétiens n’a pas qu’une dimension présente, le plus souvent humble, loin du discours dominant de notre société.

Saint Jean avec des images de son temps nous fait contempler la victoire finale et définitive de Jésus.

Précisons le sens de 2 mots. Le Trône devant qui se tiennent des multitudes d’êtres vivants.

C’est Dieu lui-même dont un Juif ne peut prononcer le nom, et l’Agneau, c’est Jésus immolé sur la croix.

Si à certains jours notre foi s’obscurcit, n’oublions pas ces multitudes d’êtres vivants qui devant Dieu proclament Il est digne, l’Agneau immolé, de recevoir puissance et richesse, sagesse et force, honneur,

gloire et louange.

N’oublions pas qu’un jour, précisément le jour de Dieu par excellence,

Toute créature dans le ciel et sur la terre, sous terre et sur la mer, et tous les êtres qui s’y trouvent,

proclament déjà la victoire totale et définitive de Dieu et de Jésus « du Trône et de l’Agneau ».

Les jours de brouillard il vaut mieux savoir où nous conduit la route.

Les jours d’épais nuages, il vaut mieux savoir que le soleil reviendra.

Unissons déjà notre cœur et notre voix à ceux qui proclament À celui qui siège sur le Trône et à l’Agneau :

la louange et l’honneur, la Gloire et la souveraineté pour les siècles des siècles.

Enfin avec l’Évangile, il nous est rappelé l’incidence de la résurrection de Jésus sur notre vie quotidienne.

Aux disciples qui ont passé toute la nuit à travailler pour rien, Jésus remplit leur filet de poissons. Jésus redonne à leurs yeux toute la valeur aux 3 ans qu’ils ont passé ensemble, que sa mort sur la croix avait semblé dévaloriser. Rien ne s’est perdu de tout cela, au contraire.

Sur la plage il leur a préparé le pain et les poissons grillés, Jésus ressuscité est toujours attentif à leurs besoins, et aux nôtres.

À Pierre qui l’avait renié par peur, Jésus rend sa dignité : il reconnaît en lui sa capacité d’aimer ; « Simon,

fils de Jean, m’aimes-tu vraiment » et lui restitue sa capacité d’accomplir sa mission : Sois le berger de mes brebis.

Et plus encore Jésus ressuscité lui donne la capacité de le suivre jusqu’au bout : Je te le dis : Quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture toi-même pour aller où tu voulais ; quand tu seras vieux, tu étendras les mains,

et c’est un autre qui te mettra ta ceinture, pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller.

Jésus conclut : « Suis-moi. »

Conclusion

Nous qui sommes ici réunis pour célébrer la victoire de Jésus sur le péché et sur la mort, il doit bien y avoir

un aspect de la Parole de Dieu annoncée qui puisse nourrir notre foi, et nous aider à vivre à la manière de Jésus.

 

2e dimanche de Pâques

Beaucoup dans notre société se réclament de saint Thomas (du moins parmi ceux qui ont encore

une culture chrétienne) et disent volontiers :

Moi je suis comme saint Thomas, je ne crois que ce que je vois.

Jésus est explicite, et au-delà de Thomas, Jésus dit à nous tous :

Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu et dans la parabole de Lazare

à la porte du riche, Jésus conclut avec cet avertissement

S’ils n’écoutent pas Moïse, ni les prophètes, même si quelqu’un ressuscite d’entre les morts,

ils ne seront pas convaincus.

  • Tout au long du récit évangélique, il est rappelé que l’accueil de Jésus est un enjeu déterminant,
  • avec de nombreux refus : à Nazareth, lors de son discours inaugural dans la synagogue, déjà
  • certains de ses compatriotes ont voulu le faire disparaître. Après la multiplication des pains et
  • le discours sur le pain de vie à Capharnaüm, beaucoup de disciples cessèrent de le suivre.

Après la « résurrection » de Lazare, les responsables juifs décident de faire mourir aussi Lazare pour effacer

toute preuve.

Il ne suffit pas de voir pour croire.

  • Dans les heures qui ont suivi la résurrection de Jésus, les disciples femmes et hommes ont vu
  • le tombeau vide. Marie-Madeleine la première à le voir, en conclut qu’on a enlevé le cadavre.
  • Lorsque Pierre et le disciple que Jésus aimait voient le linceul et le suaire repliés et bien rangés
  • dans le tombeau, Pierre repartit perplexe et interrogatif. Les responsables juifs mis au courant payent
  • les gardes pour qu’ils propagent une « infox ».

Lors des apparitions de Jésus aux disciples eux-mêmes, il y a cette notation : Beaucoup eurent des doutes.

Il n’est donc pas étonnant qu’il soit encore aujourd’hui difficile de croire.

 

En étant fidèles aux textes du Nouveau Testament, nous pouvons repérer le processus d’adhésion.

Et cela peut nous éclairer.

  • Il y a d’abord une constatation. Le tombeau vide : une forme de voir est nécessaire pour poser la
  • question (pour qu’un homme tombe amoureux il faut au minimum qu’il rencontre une femme,
  • mais on peut rencontrer une femme sans tomber amoureux.)
  • L’événement, la constatation du tombeau vide, va provoquer une relecture, qui tente de trouver une cohérence avec tout ce que la vie leur a enseigné, dans le cas de Jésus avec l’Écriture Sainte du
  • premier testament : lors de la rencontre sur le chemin d’Emmaüs, saint Luc précise :

En partant de Moïse et de tous les prophètes, il leur interpréta dans toute l’Écriture ce qui le concernait.

  • Les disciples dès qu’ils ont découvert la lumière, s’empressent de la partager avec leurs frères dans
  • la foi. Cléophas et son compagnon retournent à Jérusalem où ils trouvent les disciples qui leur disent
  • Le Seigneur est réellement ressuscité : il est apparu à Simon-Pierre. Et lorsque Thomas le soir de Pâques rejoint les autres il s’entend dire aussitôt « Nous avons vu le Seigneur « .
  • Pour que ces 3 étapes fonctionnent (constatation, relecture, partage) une condition indispensable

Il faut une disponibilité du cœur, accepter d’être bousculé, selon les cas, par Dieu, par les autres, par les événements, par la vie. Ne pas se considérer comme possesseur de la vérité, se considérer toujours en

marche.

Et probablement ne pas confondre foi et idéologie. Tous les disciples que l’on voit bouger, changer à une vitesse grand V en ces heures déterminantes ne se posent pas la question d’avoir une définition précise,

exacte et intouchable de la personne de Jésus, mais ils ont une confiance totale en lui.

Un petit enfant n’a pas besoin pour se lancer dans l’aventure de la vie, de connaître tous les tenants et aboutissants de la vie et du caractère de ses parents, il a par contre un besoin infini de leur faire confiance. Devenu adulte, ça pourra peut-être lui être nécessaire, à 2 ans ce n’est pas l’urgence.

Nous qui croyons aujourd’hui, nous n’avons pas sous les yeux, le tombeau vide, même si nous sommes

allés en pèlerinage à Jérusalem. Le site a été tellement aménagé transformé qu’il ne parle plus de la même manière que ce 14 Nisan de l’année 30.

Pouvons-nous croire sérieusement à la résurrection de Jésus.

  • Nous avons aussi le voir nécessaire, le voir constatable:

Les textes du Nouveau Testament écrits par les premiers témoins et transmis jusqu’à nous.

2000 ans d’histoire, où des hommes et des femmes ont risqué toute leur existence sur Jésus ressuscité.

Tout un patrimoine religieux : littérature, musique, peintures, architecture qui en quelque sorte disent

« Il s’est passé quelque chose il y a 2000 ans. »

  • Comme le tombeau vide, toute cette histoire doit être relue, elle n’est pas faite que de scandales,
  • elle est aussi porteuse de vie, au point qu’un philosophe connu Jean Claude Guillebaud a pu écrire « Comment je suis redevenu chrétien ».

Il y a cette expérience que tout homme ou femme peut faire aujourd’hui : l’expérience personnelle de la foi

qui remet debout, guérit les blessures de la vie, permet de donner du sens à cette aventure humaine dans laquelle nous avons été plongés.

Le nombre impressionnant de convertis et de baptisés adultes (cette année 4500 dans notre France sécularisée) en témoigne, plus encore les hommes et femmes de tout continent fidèles à Jésus Christ jusqu’au don de leur vie.

  • Cette relecture demande un partage en communauté de croyants, faute de quoi, la foi risque de s’anémier et même de se perdre dans les sables de la pensée commune. Vous pouvez constater qu’il y a encore des pratiquants, certains se sont lancés dans l’aventure du Synode et d’autres formes de rencontres existent.
  • Sans oublier, comme au temps de Jésus, notre foi peut être ignorée, ridiculisée combattue.

Comme pour Thomas et les premiers disciples c’est à nous d’être témoins de Jésus Christ ressuscité certes

avec nos limites d’hommes et de femmes par nos paroles. Mais surtout par la vie qu’il nous communique.

Sans Église, sans communauté chrétienne, le monde ne peut accéder aujourd’hui à la foi en Jésus Christ.

 

 Fête de Pâques à Saint Just

Pour les chrétiens la fête de Pâques, c’est la fête absolue.

C’est le jour où le destin du monde a basculé définitivement.

Ce qui ne rend pas facile d’en parler pour autant.

Beaucoup se sont présentés en « bienfaiteurs de l’humanité ou de leur peuple« .

C’est un titre qu’affectionnent particulièrement les dictateurs, de Staline à Pol Pot en passant

par Pinochet.

Sincèrement ou non nos 12 candidats se sont présentés comme « Sauveurs de la France ».

  • Je porterais plus volontiers mon regard vers les bienfaiteurs « anonymes ».

– Les femmes qui donnent la vie.

– Les pères et mères qui nourrissent, éduquent, protègent leurs enfants.

– Tous ceux et celles qui par leur travail quotidien (souvent peu reconnu !) permettent de disposer des

biens nécessaires à la vie : nourriture, logement, soins.

– Tous ceux et celles qui par leur engagement quotidien permettent aux hommes et femmes de vivre

ensemble pacifiquement : hommes politiques, enseignants de tous niveaux, bénévoles d’associations.

– Ceux et celles qui par leur recherche spirituelle, permettent à l’humanité de ne pas retourner à la

sauvagerie, rappellent que « l’homme ne vit pas seulement de pain« .

  • En ce temps où le printemps nous fait apprécier la beauté du monde et de la vie il n’est pas
  • inutile de s’arrêter pour nous réjouir et rendre grâce.

 

Mais pourrait-on oublier le tragique de la condition humaine.

  • Nous pensons bien sûr à l’invasion de l’Ukraine.

Le responsable (si je ne me trompe !) du pays le plus vaste de la terre et le moins peuplé, déclenche

une guerre pour agrandir son territoire, n’hésite pas à détruire des villes entières, envoie ses mercenaires

dans le monde pour étendre son influence et menace la paix mondiale par son armement nucléaire.

Beaucoup à travers le monde l’approuvent et s’en inspirent.

Il est bien difficile de comprendre que des hommes puissent en arriver là.

  • À un niveau individuel : sans être pour autant des monstres, nous peinons à construire une société
  • où chacun dispose d’un accès aux biens essentiels, où chacun, chacune est accueilli, écouté,
  • considéré, respecté.

Nous savons tous que la vie elle-même est menacée par nos excès de consommation et nous n’arrivons

pas à redresser la barre, en s’y mettant tous ensemble, et ce malgré l’insistance des sonnettes d’alarme

qui retentissent depuis plus de 50 ans.

Aurions-nous oublié que le mal existe et qu’il est le défi majeur de l’humanité.

Notre humanité a un urgent besoin de salut, et nous d’espérance (à ne pas confondre avec l’espoir que

tout va s’arranger comme par miracle !)

L’espérance c’est trouver les raisons et l’énergie pour ne pas baisser les bras.

Pour nous chrétiens cette espérance s’appelle Jésus Christ.

Marie Madeleine, Pierre et les autres disciples ont été, comme nous aujourd’hui, accablés écrasés par

le mal qui s’est déchaîné sur Jésus et même, a paru l’emporter définitivement sur celui qui était passé en faisant le bien et qui guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable.

Pouvaient-ils croire encore le soir du Vendredi que Dieu était avec lui, alors que le pouvoir religieux s’est

associé au pouvoir politique, pour le faire disparaître, en raison même de l’espérance qu’il avait suscité

dans le peuple.

  • La vie même de Jésus au cours de sa vie publique a vraiment suscité l’espérance. Lui qui était
  • dans une étable, et n’avait pas de pierre où reposer la tête a su faire confiance à 12 hommes ordinaires auxquels il a confié sa parole ; Il leur a même associé un groupe de femmes, ce qui était inconcevable dans la mentalité du temps. Il s’est laissé toucher par la souffrance de tant de malades. Il a misé sur la capacité à se relever d’une prostituée, d’un collaborateur de l’occupant, d’une étrangère.

Si Jésus a pu vivre notre condition humaine avec une telle confiance en l’homme n’oublions pas que c’est précisément à cause de son lien étroit avec Dieu son Père, lien vérifié sans cesse par la prière, la méditation

de la Parole de Dieu et l’écoute des pauvres de cœur.

Par son humanité Jésus est une interpellation pour tout homme croyant ou non.

Jésus n’est pourtant pas un bienfaiteur parmi tant d’autres.

Dans sa passion et sa mort acceptée librement il nous a montré que le mal pouvait être affronté jusque

dans ses fondements, que l’homme pouvait être guéri de la mort, mais aussi dès maintenant guéri de la cupidité qui ronge son cœur

de la peur qui l’amène à tant de compromissions

du désir de tranquillité qui nous fait souvent accepter l’inacceptable.

de la haine qui reconduit les sources de conflit de génération en génération.

C’est tout cela que Jésus a fait disparaître dans sa mort assumée librement :

Sa sortie du tombeau le 3e jour nous garantit que cette victoire sur le mal (qui nous colle à la peau)

est possible, et déjà réalisée en lui.

Sortir de la mort n’est pas en notre capacité, le transhumanisme qui veut nous le faire croire, ne peut que

nous mentir. Dieu seul, qui est à l’origine de la vie peut l’accomplir.

La résurrection de Jésus est bien la signature de Dieu sur la vie de l’homme Jésus.

Et ce que Dieu a fait en Jésus, il n’a qu’un désir, le faire avec nous.

Ce que dit saint Paul aux Colossiens : Frères, si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez

les réalités d’en haut : C’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu.

Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre.

En effet, vous êtes passés par la mort, et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu.

Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire.

Conclusion : Avec le Christ ressuscité, l’humanité a un avenir non seulement collectivement mais aussi en chacun chacune de nous qui mettons notre confiance en lui, qui mettons nos pas dans ses pas (comme le rappelle le mot synode !) pour inventer une vie à sa manière.

L’humanité et nous-mêmes avons un avenir qui ne se limite pas à notre terre mais s’ouvre à la plénitude

de la vie au-delà de la mort.

                                                                                                                                                                                                                              Jeudi Saint à Allemanche

L’Eucharistie est bien l’élément central de la vie chrétienne.

Lors du baptême, nous avons été plongés dans la mort et résurrection de Jésus Christ,

pour ne faire qu’un avec lui. Saint Paul va jusqu’à dire  « être membres de son corps. »

Pour que cela ne reste pas que des mots, nous avons à garder vivants à l’esprit :

  • On ne peut être le corps du Christ c’est-à-dire l’humanité du Christ continuée à travers les âges,
  • de nous-mêmes, de notre seule générosité.

Nous sommes des invités, rassemblés par Dieu lui-même, qui veut réunir toute l’humanité,

dans la joie et dans l’amour, en Jésus Christ son fils unique. Personne ne peut-être à lui tout seul

le corps et le sang du Christ. L’assemblée eucharistique se doit d’être une anticipation de cette humanité réconciliée, un signe pour le monde.

  • Notre conversion, notre partage d’humanité à humanité divinisée ne peut se faire par le seul rite initial du baptême : ce travail spirituel cette conversion se doit d’être remis sur le métier en permanence.

L’Église, les chrétiens à travers les âges ont compris qu’il fallait se retrouver chaque dimanche en mémoire

de la mort et résurrection de Jésus, qui est pour nous l’unique chemin de la divinisation.

  • Jésus, pour faire mémoire de sa vie donnée par amour, donnée pour que la vie l’emporte
  • définitivement sur la mort et le péché, a choisi le partage du pain et du vin.

Le repas est le rite fondamental de toute l’humanité croyante ou non où les hommes et les femmes se reconnaissent mutuellement dans leur humanité, partagent la nourriture qui assure leur survie,

et renforcent leurs liens d’amitié.

Jésus a choisi ce geste universel du repas, où il nous fait participer à sa propre vie de ressuscité.

C’est bien son corps que nous partageons et mangeons pour devenir membre de son corps car nous

devenons ce que nous mangeons. C’est bien son sang que nous buvons pour qu’il coule vraiment dans

nos veines, pour que nos pensées soient les siennes, nos affections soient en communion avec les siennes,

nos actions soient sources de vie.

  • Nous pouvons en rappeler deux conséquences incontournables.

1 – Partager la parole de Dieu, particulièrement les évangiles qui nous rappellent à temps et à contretemps

ce qu’a été la vie de Jésus parmi nous. Sans quoi l’Eucharistie risque de devenir une célébration routinière.

2 – Comme le dit fortement l’évangile du lavement des pieds.

Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds

les uns des autres.

C’est un exemple que je vous ai donné, afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous.

Vivre nous aussi au service des autres, faute de quoi l’Eucharistie risque de devenir mensongère.

C’est ce que je vous propose de vivre aujourd’hui, en partageant, tout simplement, un exemple de geste fraternel dont vous avez été témoin, acteur, ou bénéficiaire.

 

Dimanche des Rameaux 2022

La célébration des Rameaux se présente dans un contexte pour le moins original.

Nous avons commencé la célébration en rappelant l’entrée glorieuse de Jésus à Jérusalem,

acclamé comme roi par le peuple.

Béni soit celui qui vient, le roi, au nom du Seigneur

Paix dans le ciel et gloire au plus haut des cieux.

Lorsque des Pharisiens veulent faire arrêter cette reconnaissance de Jésus comme Roi,

Jésus a cette réponse forte : « si eux se taisent, les pierres crieront. »

Ce même jour pour les Français d’aujourd’hui, 12 candidats se présentent à l’élection

précisément pour obtenir le rôle de « Roi pour 5 ans ». Ils ont donc organisé des

rassemblements populaires pour se faire reconnaître, acclamer, considérer comme

sauveurs indispensables ou providentiels, souvent même en dévalorisant les 11 autres.

On ne peut pas faire l’économie d’un chef à la tête du pays. Et toute responsabilité si

petite soit-elle demande d’avoir la capacité de diriger, donc un pouvoir. C’est vrai d’un

chef d’entreprise, d’un président d’association, d’un maire, d’un curé d’une paroisse,

d’un professeur devant sa classe, d’un père ou d’une mère de famille.

Jésus accepte d’être roi, mais il remet immédiatement les choses au point.

Les rois des nations les commandent en maîtres, et ceux qui exercent le pouvoir

sur elles se font appeler bienfaiteurs.

Pour vous, rien de tel  ! Au contraire, que le plus grand d’entre vous devienne comme

le plus jeune, et le chef, comme celui qui sert.

Eh bien moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert.

Il est rare dans l’Évangile de voir Jésus dicter explicitement la conduite de ses auditeurs ;

Là Jésus est catégorique avec ses apôtres, ceux qu’il a lui-même choisis.

Si nous nous reconnaissons comme disciples de Jésus : le pouvoir ne peut être au

bénéfice de celui qui l’exerce, mais au service des « administrés ». Ceux et celles qui ont

une mission dans l’Église se doivent de le rappeler au monde par leur manière d’agir.

« Je suis au milieu de vous comme celui qui sert » dit Jésus.

 

La célébration des Rameaux se présente aussi dans un contexte de grande incertitude et de

douleur avec la guerre en Ukraine. Tout près de nous.

Un peuple est écrasé : sommé de renoncer à sa culture, à sa liberté, de n’être qu’un appendice

d’un dirigeant dont la force semble la seule référence.

Des citoyens aux mains nues sont massacrés, femmes, enfants ou contraints à l’exil.

La parole est insultée, détournée au service de la propagande, du mensonge.

Un pays est ravagé, anéantissant les infrastructures économiques nécessaires à la vie et

compromettant tout le travail d’organisation aussi nécessaire que les maisons.

Le respect et la sauvegarde de la maison commune sont bafoués par les conséquences

écologiques des combats, par l’utilisation des richesses pour tuer et détruire, richesses

détournées du service de la vie.

 

Comment ne pas faire le lien avec ce que Jésus a vécu dans sa passion et sa mort que nous

venons de proclamer.

Jésus qui a mis toute sa vie, toute son intelligence, tout son temps au service de ses frères en

humanité, est d’abord contesté par les Pharisiens lors de son entrée à Jérusalem.

Le dernier soir, il est trahi par Judas, renié par Simon Pierre, abandonné par les 10 autres,

arrêté illégalement on dirait aujourd’hui, maltraité par les gardes.

Les grands prêtres, les anciens du peuple et les scribes (les intellectuels d’alors) ne cherchent

pas à faire la vérité sur Jésus mais recherchent un prétexte pour le faire mourir.

Devant le gouverneur romain, ils donnent des arguments qu’ils savent pertinemment faux :

Jésus n’a jamais voulu organiser la moindre révolte, alors qu’eux-mêmes la souhaitaient

pour expulser les Romains de leur pays.

Hérode se contente du mépris et des moqueries parce que Jésus s’est refusé à son jeu.

La violence contre Jésus ne s’arrête pas là. Il devra subir le supplice dégradant de la Croix,

être mis au rang des assassins, être insulté par les chefs et les soldats jusqu’à son dernier souffle.

 

Si 2000 ans après on parle encore de la mort de Jésus comme un événement clef de l’histoire

de l’humanité, c’est bien parce qu’en face de la déshumanisation programmée et orchestrée

par les forces du mal, par le côté sombre de l’humanité, Jésus a sauvé en lui et pour nous la dimension lumineuse de l’homme.

Aux femmes de Jérusalem qui pleurent sur lui, il répond : pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur

vos enfants. Traduisons « Ne pleurez pas sur moi, libérez-vous du mal qui vous habite encore

vous et vos enfants », pour ne pas être solidaires des forces de mort.

Au bandit qui avait commencé par l’insulter et fait un retour sur lui-même, Jésus ouvre un avenir infini. Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis.

Au déchaînement de la violence et de la haine, Jésus oppose la confiance absolue au Dieu de vie :

Père, entre tes mains, je remets mon esprit.

Déjà le centurion témoigne : Celui-ci était réellement un homme juste.

Il faudra attendre le 3e jour où Dieu lui-même témoigne que la mort et le mal sont définitivement

vaincus, Jésus se relève vivant du tombeau.

 

Dans sa mort sur la Croix, et dans ses souffrances qui écrasent tant de ses frères et sœurs encore

aujourd’hui, Jésus nous invite à prendre le parti du centurion. Écoutons :

L’appel à la solidarité pour les victimes des guerres et de la pauvreté.

L’appel au respect de la création dans notre vie quotidienne : ne pas se plaindre seulement du prix

des carburants, mais changer nos modes de vie.

L’appel à persévérer ou devenir artisans de paix dans notre famille, notre entourage.

L’appel à une meilleure connaissance empathique de notre monde, ne pas nous contenter d’une

info spectacle superficielle, encore moins mensongère.

L’appel à ne pas mélanger l’agir, l’objectif de tant d’oligarques avec les attentes de leurs peuples

qui souffrent eux aussi de l’oppression.

L’appel à ne pas être exclusifs, partiaux, dans nos sympathies. L’Ukraine c’est à notre porte et ça

nous touche ; des peuples sont malmenés, persécutés en Afrique, Amérique et Asie, ne les oublions

pas non plus.

 

Homélie du 27 mars :  4e dimanche de Carême

Pardon et réconciliation. Qui peut oser parler de pardon et de réconciliation,

au moment où nous assistons d’ici à la destruction d’un pays et d’un peuple et que rien ne semble

en capacité d’arrêter celui qui a déclenché cette guerre.

Je vous encourage à relire tout le chapitre 7 de l’encyclique de François Fratelli Tutti. Je ne me situe

pas au niveau d’une analyse politique, mais tenter, pauvrement, de chercher un peu de vérité au

milieu de tant de contradictions et complications. Je cite un seul passage le numéro 250, un choix

arbitraire qui ne supprime pas d’autres aspects. Le Pardon n’implique pas l’oubli. Nous disons

plutôt que lorsqu’il y a quelque chose qui ne peut, en aucune manière, être nié, relativisé ou dissimulé,

il est cependant possible de pardonner. Lorsqu’il y a quelque chose qui ne doit jamais être toléré,

justifié ou excusé, il est cependant possible de pardonner. Quand il y a quelque chose que pour

aucune raison nous ne pouvons nous permette d’oublier, nous pouvons cependant pardonner.

Le pardon libre et sincère est une grandeur qui reflète l’immensité du pardon divin. Si le pardon est

gratuit, alors on peut pardonner même à quelqu’un qui résiste au repentir et qui est incapable de

demander pardon.

Je n’ai pas à me substituer aux Ukrainiens. J’ai à rappeler humblement que nous sommes concernés

par le pardon et la réconciliation dans notre quotidien à la lumière de la Parole de Dieu.

Saint Paul nous dit avec insistance que Dieu est la source de toute réconciliation. Je cite :

  • Dieu nous a réconcilié avec lui par le Christ.
  • C’est bien Dieu qui dans le Christ réconciliait le monde avec lui, il n’a pas tenu compte de
  • nos fautes.
  • C’est Dieu lui-même qui lance un appel.
  • Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous, identifié au péché.

C’est une véritable litanie : qui nous montre la volonté explicite de Dieu d’arracher les hommes au

mal qui les défigure individuellement et collectivement, volonté de Dieu qui a pris forme dans

Jésus Christ crucifié qui précisément sur la croix a pardonné à l’un des bandits qui avait

commencé par l’insulter, à qui Jésus répond : « Aujourd’hui même tu seras avec moi dans le paradis »,

qui a demandé à son Père le pardon pour les responsables religieux et politiques qui eux ne

le demandaient pas. « Père pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font« . Volonté explicite

pour nous tous, manifestée dans le quotidien du ministère de Jésus, qui fait dire aux Pharisiens et

aux scribes : Cet homme fait bon accueil aux pécheurs et il mange avec eux.

Nous pouvons donc, en toute confiance répondre à l’exhortation de Paul

Au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu formule de l’imposition des Cendres.

Et reconnaître la chance que nous avons encore aujourd’hui : chaque dimanche nous sommes

invités à sa table, où il partage avec nous le pain et le vin en mémoire de Jésus pour le pardon de

nos péchés, afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu. Nous ne sommes pas

pardonnés pour notre seul bénéfice personnel, voire pour notre tranquillité personnelle.

Nous sommes témoins du pardon pour le monde qui nous entoure. Saint Paul ose nous dire :

Nous sommes les ambassadeurs du Christ. Si quelqu’un est dans le Christ, il est une créature nouvelle.

Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né. Il nous a donné le ministère de

la réconciliation. Il a déposé en nous la parole de la réconciliation.

Chaque chrétien se doit d’être, là où il vit, en famille, au travail, dans les loisirs, les activités de solidarité,

des témoins du pardon de Dieu par un accueil sincère, une joie simple de la rencontre des autres par une attitude de non-jugement, une source de confiance et de paix, témoin et acteur du monde nouveau

inauguré par Jésus Christ par ses actes et ses paroles, mais surtout par son être même.

La parabole du Père miséricordieux, illustre admirablement le pardon.

Le père aime ces 2 fils, sans que cet amour les écrase ou les emprisonne dans une dépendance.

À la demande du plus jeune le père partage ses biens à l’un et l’autre.

Il laisse partir le plus jeune. Son amour reste entier, malgré sa peine que l’on divine, son amour

le rend encore plus vigilant. C’est bien lui qui l’a reconnu de loin, va au-devant de lui,

le prend dans ses bras, le couvre de baisers.

  • Le Père accueille la demande de pardon de son enfant car c’est encore respecter sa dignité,
  • l’amour ne peut s’imposer. Le Père accepte « J’ai péché contre le ciel et contre toi,
  • je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Le Père accepte car l’amour suppose la vérité
  • dans la relation !

Mais le Père lui coupe la parole avant qu’il ne dise « Traite-moi comme l’un de tes ouvriers »,

et à la place, le rétablit dans sa dignité de fils, en le faisant revêtir du plus bel habit,

lui remet la bague au doigt, et des sandales aux pieds, et sans plus tarder commander le repas de fête.

  • Avec le fils aîné, le Père tente de le libérer, de lui-même, qui avait laissé sa vie s’encombrer
  • d’une fidélité oppressante. Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais
  • transgressé tes ordres, vivait dans une sorte de jalousie vis à vis de son frère :
  • Jamais tu ne m’a donné un chevreau pour festoyer avec mes amis, alors que tu as tué le veau g
  • ras pour lui.

Le Père qui représente Dieu dans son amour infini, lui rappelle la chance qu’il a et dont

il n’a plus conscience. Oubli qui finit par empoisonner sa vie.

Il insiste Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi.

Et il invite à vivre cet amour reçu de son père, avec son propre frère.

Qu’il soit aussi pour son frère, source de vie comme lui-même le père l’est en le réintégrant dans

la maison. Cette invitation du père au fils aîné, Dieu nous la fait à chacun de nous qui habitons

toujours sa maison.

Homélie du 20 mars  :  3e dimanche de Carême

Construire une fraternité nouvelle (j’ajoute « universelle »)

tel est le titre pour cette 3e semaine de Carême.

La vision du buisson ardent est un des fondements de la fraternité.

Moïse si on peut dire, avait eu la chance de passer à travers les gouttes.

Livré au fleuve comme les autres garçons hébreux,

il avait touché le cœur de la fille de Pharaon elle-même ;

élevé, éduqué avec tous les avantages et facilités que l’on devine.

Il n’avait pas trop de soucis à se faire, devenu adulte.

Il va d’abord prendre le parti de ses frères de races,

il va se mettre hors la loi en tuant un Égyptien qui frappait un Hébreu.

Obligé de s’enfuir, il va retrouver la faveur d’un chef de tribu nomade qui

lui donne sa fille en mariage.

Ça aurait pu s’arrêter là. Il aurait pu couler des jours tranquilles.

L’intervention de Dieu, va le sortir de sa tranquillité.

Moïse avait bien conscience que le Dieu vivant n’est pas le Dieu

qu’il a connu dans le monde de Pharaon.

« Mais le Dieu de ses pères, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob« .

Le Dieu de ses pères n’est pas relégué dans un ciel mythique, il est impliqué avec son peuple.

Je pense que Moïse a été profondément bouleversé par les paroles que Dieu lui adresse.

J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte.

J’ai entendu ses cris sous les coups des surveillants.

Oui je connais ses souffrances.

Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens.

Le premier temps de toute fraternité, c’est bien de voir l’autre,

de voir l’autre dans la réalité de sa vie, surtout s’il est dans la souffrance,

de ne pas se détourner.

Il n’est pas étonnant que Dieu ajoute :

Maintenant va ! Je t’envoie chez Pharaon

Tu feras sortir d’Égypte mon peuple. Encore aujourd’hui :

La foi en Dieu est indissociable de l’attention aux besoins des hommes,

du moins dans le cas de la foi chrétienne. (Je ne me prononce pas à

la place des autres religions !)

L’Évangile rejoint sans peine la vocation de Moïse.

Tout comme lui, nous sommes dans un monde de violence, où tant

d’hommes et de femmes souffrent.

La violence peut être le fait des hommes.

Des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer,

mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient.

La violence peut être due au hasard ou à la nature. Sont évoquées ces

18 personnes tuées par la chute de la tour de Siloé.

Devant ces réalités qui sont toujours les nôtres aujourd’hui, Jésus nous interroge :

Pensez-vous que ces victimes étaient plus pécheurs, plus coupables que les autres,

et donne la réponse « pas du tout » avec une grande solennité. « Je vous le dis ».

L’interrogation et la réponse de Jésus, nous obligent à sortir des idées toutes faites

concernant la souffrance des autres. À ne pas nous replier sur notre confort.

Jésus ajoute un avertissement :

Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même.

Et selon son habitude Jésus raconte la parabole du figuier qui ne donne pas de fruit.

Sans culpabiliser qui que ce soit, il nous rappelle qu’il nous faut produire

du fruit pour faire vivre les autres. Ce qui est le but de toute fraternité.

Car un figuier ne produit pas la nourriture pour lui-même  mais pour les autres.

Nous avons pu lire avec cet extrait de Fratelli tutti dans notre livret de Carême.

Certes une tragédie mondiale comme la pandémie de Covid 19

(il faut ajouter maintenant : comme la guerre en Ukraine)

a réveillé la conscience que nous constituons une communauté mondiale qui navigue

dans le même bateau, où le mal de l’un porte préjudice à tout le monde.

Nous nous sommes rappelés que personne ne se sauve tout seul,

qu’il n’est possible de se sauver qu’ensemble !

La fraternité est une urgence.

C’est vrai pour les mesures individuelles de protection pour éviter autant que

possible les contaminations. C’est vrai aussi pour nos actes de solidarité avec

les plus pauvres, par les dons d’argent, ou des biens directement utilisables,

par un regard positif sur eux. La fraternité a aussi une dimension collective :

on ne peut vaincre la pandémie simplement avec les masques et vaccins individuels.

Il faut aussi un engagement de toute la société qui rend possible la fabrication des vaccins,

l’accueil dans les hôpitaux pour soigner.

L’accueil des réfugiés d’Ukraine et d’autres migrants demande la mise

en place de moyens économiques, en transports, logements, écoles etc.

qu’un individu isolé ne peut assurer. Les polonais en donnent un bel exemple

après l’avoir refusé pour d’autres !

Ce n’est pas un homme isolé qui peut arrêter les chars de Poutine.

Il faut aussi l’engagement des responsables politiques du monde entier.

Et il faut que ces responsables se sentent soutenus par la volonté des peuples

de vivre en paix, de collaborer dans le respect de chacun.

En Fratelli tutti au § 180, François rappelle :

Un individu peut aider une personne dans le besoin, mais lorsqu’il

s’associe à d’autres pour créer des processus sociaux de fraternité

et de justice pour tous, il entre dans le champ de la plus grande charité,

la charité politique. Il s’agit de progresser vers un ordre social et politique

dont l’âme sera la charité sociale.

Je crois profondément que cela éclaire aussi bien notre participation

à la campagne CCFD-Terre Solidaire, l’action dans des associations solidaires

et l’élection présidentielle, où l’enjeu du vivre ensemble est déterminant.

En conclusion je citerai encore  » Fratelli tutti au § 35

Plaise au ciel (le pape nous rappelle la nécessité de la prière !)

que tant de souffrance ne soit pas inutile, que nous fassions un pas

vers un nouveau mode de vie et découvrions définitivement que nous avons

besoin les uns des autres et que nous avons des dettes les uns envers les autres,

afin que l’humanité renaisse avec tous les visages, toutes les mains

et toutes les voix au-delà de toutes les frontières que nous avons créées !

 

Homélie du 13 mars : 2e dimanche de Carême

Contempler le monde.

Le titre de cette semaine me semble rejoindre l’actualité à la fois dans

sa dimension positive et négative.

Le magnifique temps ensoleillé peut nous réjouir profondément et

la guerre en Ukraine a de quoi nous accabler profondément.

Nous sommes invités à découvrir des contemplatifs, d’autant

plus que nous sommes sans cesse confrontés à ce qui est mal,

à ce qui détruit, enlaidit, compromet la vie. Nous avons en quelque

sorte à compenser l’horreur de la Croix par l’amour qui la transfigure

et par la résurrection qui arrache la vie de Jésus et la nôtre à l’absurde.

Reconnaissons d’abord que nous avons laissé l’utilitaire cacher la gratuité.

  • Notre terre est devenue une carrière de matériaux, une réserve de biens consommables,
  • aux dépens d’un regard admiratif et du respect pour les beautés qu’elle nous offre.
  • Nous avons bâti un ensemble de formules mathématiques pour résumer l’univers,
  • mis la vie en formules chimiques et en processus divers.
  • C’était nécessaire du point de vue scientifique et opérationnel.
  • Le risque c’est que l’univers nous devienne in-intelligible, ne nous fasse plus signe.

Et le second risque, notre regard atrophié sur le monde peut devenir aussi

un regard atrophié sur l’homme. Le pape François dans Laudato Si nous alerte au numéro 76 :

Pour la tradition chrétienne, dire « Création » c’est signifier plus que « nature »,

parce qu’il y a un rapport avec un projet de l’amour de Dieu dans lequel

chaque créature a une valeur et une signification.

La nature s’entend d’habitude comme un système qui s’analyse,

se comprend et se gère, mais la création peut seulement être comprise

comme un don qui surgit de la main ouverte du Père de tous, comme

une réalité illuminée par l’Amour et nous appelle à une communion universelle.

Dans le récit de la Genèse, Dieu invite d’abord Abraham à l’admiration.

« Regarde le ciel, et compte les étoiles si tu peux. »

Or c’est à un homme profondément blessé que Dieu s’adresse.

Abraham n’a pas d’enfant et il est âgé ainsi que Sara son épouse.

Et devant le ciel étoilé qu’il contemple, Dieu lui fait signe, lui ouvre un avenir :

Telle sera ta descendance.

Un avenir qui n’est pas mythique, mais croyable, puisque enraciné dans son expérience.

Dieu lui dit : Je suis le Seigneur qui t’ai fait sortir d’Our

en Chaldée pour te donner ce pays en héritage. Un héritage ne sert à rien s’il n’y a pas d’héritier !

Et Dieu va accepter de faire alliance avec Abraham en utilisant les rites des tribus nomades.

Dieu se plie à l’univers culturel d’Abraham, un sacrifice d’animaux.

À ta descendance je donne le pays que voici.

Avec ce temps de Carême Dieu ne serait-il pas à nous inviter nous aussi à

renouveler notre confiance en l’avenir, en la vie, en notre monde ?

En prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, Jésus invite ces 3 disciples à se libérer

du quotidien, de la banalité qui risque de nous enfermer et nous aveugler.

Jésus leur fait gravir une montagne, ce qui oblige déjà à changer de regard, et les introduit à prier.

C’est un autre déplacement, non pas physique mais spirituel, celui-ci !

Et c’est la découverte admirative de Pierre, Jean et Jacques de Jésus

dans toute sa splendeur de Fils, choisi par Dieu le Père, splendeur de son visage

et de toute sa personne par la blancheur éblouissante de son vêtement.

C’est la découverte, admiratifs, que cet homme dont ils ont partagé le quotidien

est en communion étroite avec Moïse et Élie les témoins de Dieu par excellence.

Ils peuvent donc faire une confiance absolue à tout ce qu’ils ont vécu avec Jésus,

toutes les paroles qu’ils ont entendues de lui, suivre le chemin qu’il trace devant eux.

« Écoutez-le« . C’est la parole qui leur ouvre un avenir.

Le récit de la transfiguration nous interpelle nous aussi.

Nous sommes invités à nous retirer avec Jésus sur la montagne pour prier

c’est à dire prendre du recul avec nos contraintes quotidiennes, sortir des flots

de paroles qui nous inondent, retrouver la valeur du silence, pour écouter

Dieu qui parle à notre cœur, à notre communauté chrétienne d’Anglure.

Nous convie à la confiance et un amour plus authentique et si

nous sommes habités par la peur sûrs de la victoire.

Comme Pierre, Jean et Jacques nous avons un maître pour nous guider, Jésus Christ.

Notre temps n’est pas moins bouleversé que celui d’Abraham et des apôtres

nous pouvons appliquer à notre présent cette parole de saint Paul aux Philippiens.

Beaucoup de gens se conduisent en ennemis de la croix du Christ.

Ils mettent leur gloire dans ce qui fait leur honte ; ils ne pensent qu’aux choses de la terre.

Notre regard sur le monde et sur nous-mêmes n’est pas pour nous accabler

mais pour nous remettre debout, nous redonner l’intelligence des évènements

avec le regard de Jésus, et de ce fait nous ouvrir à un avenir, qui nous permet de vivre le présent.

Ce que saint Paul dit aux Philippiens est bon pour nous aussi.

Nous avons une citoyenneté dans les cieux, d’où nous attendons comme sauveur

le Seigneur Jésus Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de

son corps glorieux, avec la puissance active qui le rend même capable de tout

mettre sous son pouvoir. Ainsi, mes frères bien-aimés (pour qui j’ai tant d’affection,

vous, ma joie et ma couronne) tenez bon dans le Seigneur.

Je me permets d’ajouter. Le jour où l’état du monde, la peur de l’avenir ou

la conscience que nous avons de nous-mêmes nous accablent,

n’oublions pas Celui qui est ressuscité vainqueur du mal et de la mort,

celui qui est transfiguré, c’est celui qui est mort, supplicié, rejeté, méprisé sur la croix.

En final, si vous avez Laudato Si, relisez le n° 100.

 

Homélie du 6 mars : 1er dimanche de carême

Rompre avec la toute puissance.

Le titre de ce dimanche, peut nous apparaître totalement décalé par rapport à

la réalité que nous vivons.

Ce qui nous habite très probablement, c’est plutôt un sentiment d’impuissance.

Impuissance : en face de l’invasion de l’Ukraine que nous désapprouvons.

Impuissance : face aux défis de notre société qui se prépare à élire un nouveau président.

(Y compris si c’est le même qui ajoute un deuxième mandat.)  Impuissance :

face aux énormes défis de l’humanité, qui sont rappelés sans cesse par les médias,

l’immigration, la pauvreté, la dégradation de notre maison commune.

Impuissance : face aux dérives mêmes qui affectent notre Église.

Impuissance : devant la complexité administrative.

De plus, si on regarde la physionomie de notre assemblée,

il n’y a pas beaucoup de décideurs parmi nous, mais plutôt des gens modestes, des retraités.

Nous sommes pourtant concernés :

d’abord au nom de notre humanité.

La fragilité humaine nous habite tous. La reconnaître dans un premier temps,

c’est porter sur nous-mêmes un regard en vérité. Mais cela ne doit pas

pour autant nous accabler (et nous démobiliser), puisque l’expérience

de notre fragilité est la base de la fraternité. Nous avons besoin des autres et

les autres ont besoin de nous. On l’a expérimenté ensemble avec la pandémie

où la société a redécouvert que la vie n’était pas possible sans la collaboration

des plus petits, des plus déconsidérés des travailleurs. Notre fragilité est un appel

à apporter simplement notre part à l’œuvre commune de ne faire qu’une humanité solidaire.

On ne peut nier que la fragilité a été le dynamisme qui a fait passer

les hommes et les femmes du stade d’hominidé à ce que nous constatons aujourd’hui

avec la diversité des civilisations, et les multiples réalisations positives de l’esprit humain.

Nous sommes doublement concernés : au nom de notre foi chrétienne,

car Dieu se faisant l’un de nous en Jésus Christ, a choisi dès sa naissance

un statut de pauvre, de travailleur manuel. Précisément dans l’Évangile

de ce premier dimanche de Carême, Jésus nous est présenté

comme affronté comme nous au rêve de toute puissance, toute puissance pour

disposer de tous les biens nécessaires à la vie.

  • Jésus refuse de changer les pierres en pains pour combler sa faim personnelle,
  • alors qu’il multipliera les pains pour la foule affamée, en ayant bien soin de prier
  • son Père de bénir les pains qu’il allait distribuer, et en partant des quelques
  • 5 pains et 2 poissons qu’un jeune garçon a accepté de donner.

Jésus s’appuie à la fois sur la bonté de Dieu envers l’humanité, et à la fois sur

les ressources des hommes.

  • Jésus est affronté à la toute puissance pour être reconnu comme sauveur.

Jésus manifeste clairement qu’il est en capacité de changer le cours de l’histoire humaine,

en rappelant à la vie 3 personnes mortes prématurément, en calmant la tempête

où les disciples se voyaient déjà en train de périr. Pourtant toute sa vie publique,

Jésus passera des nuits entières en prière pour rester fidèle à Dieu son Père,

il imposera le silence à bien des malades guéris. Il prendra ce chemin humble

de choisir et former durant 3 ans des disciples qui continueront son œuvre

en direction du monde entier.

  • Affronté à la toute puissance artificielle de la notoriété,

Jésus refusera de faire des miracles quand les pharisiens et docteurs

de la loi lui demandent pour le mettre à l’épreuve, quand Hérode le lui

demande par curiosité, et les chefs des prêtres par défi lorsqu’il est crucifié.

Et même après le discours sur le pain de vie, où beaucoup cessent de suivre Jésus,

il dit aux 12 « et vous, n’avez-vous pas l’intention de partir »

même pour les 12 Jésus laisse la porte ouverte, de ce fait à chacun de nous.

Pour Jésus le refus de la toute puissance culmine dans sa Passion.

Jésus refuse toute forme de manipulation pour obtenir l’adhésion des hommes,

après une entrée solennelle à Jérusalem qui l’authentifie comme le Messie attendu,

il réunit ses proches pour un repas fraternel où il fait don de lui-même par le partage

du pain et du vin, et le lavement des pieds où il se met au rang de serviteur.

Dans l’agonie au Jardin des oliviers, Jésus en fidélité à l’amour de Dieu son Père

pour lui-même et toute l’humanité, il renonce à toute défense, à toute protection

et se livre à la haine de ses opposants.

Il se fait frère de nous tous en portant toutes les souffrances injustes qui accablent l’humanité.

Et plus que tout il se laisse emporter par la mort comme c’est le lot de tous les hommes et femmes.

La victoire de Jésus sur le mal et sur la mort par sa résurrection, authentifie les choix

et les pratiques de Jésus tout au long de sa vie, et nous garantit que c’est aussi pour

nous le choix de la vie. Ce choix est aussi à notre portée.

Lorsque nous éduquons au lieu d’imposer, les parents le savent avec leurs enfants

Lorsque nous partageons au lieu de tout garder pour nous.

Lorsque nous cherchons et partageons la vérité plutôt que de pratiquer le mensonge,

le silence approbateur, la complaisance aux fausses nouvelles.

Lorsque nous prenons le temps de prier pour maintenir une relation vivante avec Dieu.

Lorsque nous refusons la facilité au profit de la persévérance.

Lorsque nous pratiquons, fréquentons la Parole de Dieu, pour ne pas être anesthésiés

par les idées toutes faites et dominantes.

Lorsque nous accueillons le pauvre avec sympathie et compréhension.

C’est alors que nous participons au salut du monde, il n’est pas nécessaire

pour nous de prendre les armes pour se battre en Ukraine.

 

Homélie du 2 mars :  la messe des Cendres

Lorsque les musulmans font le ramadan, on en parle dans les médias,

car les changements dans leurs comportements sont visibles par la société.

Avec les trois pôles du carême chrétien, Jésus nous demande explicitement

de rester discrets. Quand tu fais l’aumône, ne fais pas sonner la trompette devant toi.

Quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites :

ils aiment à se tenir debout dans les synagogues ou aux carrefours

Quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu.

Et chaque fois Jésus donne la même raison

Ton Père qui voit dans le secret, te le rendra.

On peut déjà tirer 2 conclusions « provisoires ».

1) Remercions nos frères et sœurs musulmans qui nous interpellent sur

l’enracinement de notre foi dans la vie ? Car il faut bien reconnaître que

globalement nous chrétiens, nous avons à faire beaucoup de progrès,

dans le partage, la prière et le jeûne, et le carême était un peu passé aux oubliettes.
Il n’est pas humiliant que ce soient des non-chrétiens qui nous « rappellent à l’ordre ».

Jésus lui-même a accepté qu’un officier romain à Capharnaüm et une femme païenne

de la région de Tyr et Sidon lui disent l’attente du salut par le monde entier,

bien au-delà de son peuple.

2) Jésus nous donne une raison plus fondamentale. Notre relation à Dieu notre Père.

Notre fidélité à Dieu n’a pas comme raison d’être, l’approbation du public

(nous ne cherchons pas des supporters !) mais de faire la volonté de

Dieu notre Père comme l’a fait Jésus tout au long de sa vie, et jusqu’à la croix.

Le carême nous remet en face de l’essentiel de la vie chrétienne, le partage, la prière et le jeûne.

  • Le partage. Les chrétiens sont reconnus par notre société comme très
  • présents dans ce domaine, ils sont toujours nombreux dans les associations
  • qu’ils animent, le CCFD-Terre Solidaire est une réalité emblématique.
  • Ils sont aussi à l’origine et présents dans beaucoup d’associations
  • neutres comme les Restos du Cœur.

On en finirait plus de nommer toutes les associations confessionnelles ou

non-confessionnelles, à chacun(e) de choisir selon sa vocation,

là où il est mieux à même de servir. Il reste important que

les chrétiens continuent de faire vivre des associations explicitement

chrétiennes car c’est la dimension spirituelle de l’homme qui est en cause,

et les associations chrétiennes sont un stimulant pour les autres et même pour l’État.

Le rapport annuel sur la pauvreté, à l’initiative du SecoursCatholique le prouve,

il y a place et pour le SecoursCatholique et pour le Secours Populaire !

  • Au niveau partage, les chrétiens ont à rappeler par leur action et leur parole,
  • que la raison profonde, c’est bien que nous avons tous le même Père céleste,
  • que nous soyons croyants ou non. C’est le message fort de Fratelli tutti.

La prière est également un service de notre monde : éblouies par leurs réussites,

nos sociétés développées ont remis Dieu au rang des accessoires inutiles ou gênants :

en conséquence : La prière peut être considérée comme du temps perdu, une aliénation.

Dieu n’a pas besoin qu’on lui dise dans la prière ce qu’il doit faire.

Il n’a pas besoin qu’on lui donne du temps pour qu’il savoure son pouvoir sur nous.

  • Par contre nous nous savons que nous avons un besoin d’être aimés
  • infiniment et tous nos amours humains sont limités, nous finissons
  • toujours par en faire l’expérience.

Nous avons un besoin vital de relations, et la solitude nous

rejoint un jour ou l’autre. Nous pouvons nous donner une multitude d’objectifs

et de choses à faire, ça ne nous dira jamais pourquoi nous sommes nés,

ni vers quoi nous allons.

  • La prière est de l’ordre de la rencontre avec l’Infini, avec l’Amour sans faille.

La prière est de l’ordre de la plongée dans notre source vitale, et dans le but de

notre existence : polarisée, attirée par l’accomplissement parfait de notre être.

Ce qui demande à la fois, de nous retirer dans la pièce la plus secrète,

de fermer la porte et de prier le Père présent dans le secret.

Cela demande aussi, de nous retrouver entre chrétiens pour nous soutenir

mutuellement, et faire de nous, ensemble, les témoins de ce Dieu source de vie

pour l’humanité. Le jeûne. Des 3 c’est probablement celui qui a le plus souffert

de la sécularisation, la publicité au quotidien ne cesse de nous solliciter pour

acheter ceci ou cela, de manger et boire, de nous offrir les vacances ou

les objets les plus prestigieux. Nous en sommes presque devenus esclaves.

Mais plus gravement nous avons mis en péril notre maison commune,

jusqu’à la vie elle-même par l’exacerbation de nos désirs, par l’exaltation de nos droits,

en oubliant nos devoirs et nos responsabilités. Là nous allons dans le mur.

Le jeûne n’est pas une privation arbitraire, mais la nécessaire limitation de

nos désirs, pour que nous soyons libres intérieurement, et que tous

les hommes et femmes puissent trouver une place sur notre terre.

Le jeûne prend la forme de la sobriété dans tous les domaines de notre existence.

Pierre Rabhi avait cette expression « la sobriété heureuse ».

C’est aussi tout le message et l’appel de Laudato-si.

Le jeûne peut porter tout aussi bien sur la réduction de la viande,

sur les heures de communications virtuelles, les déplacements en voiture,

mais aussi dans une connaissance plus grande de nos fonctionnements collectifs.

Le placement de notre argent dans des placements écologiques et solidaires.

Saint Paul nous rappelle dans ce monde,  nous sommes les ambassadeurs du Christ

nous sommes les coopérateurs de Dieu. Le carême n’a pas d’autre raison

d’être que de nous mettre en cohérence avec notre être profond et définitif.

Homélie du 27 février:  8e dimanche du temps ordinaire

Je pense que nous avons tous été atterrés, consternés par la guerre en Ukraine.

Nous éprouvons tous, vous et moi un sentiment d’impuissance, car ce n’est pas nous

« pratiquants de Sézanne » qui allons régler le conflit, faire rentrer l’armée russe

dans son pays, ni même influencer, modérer en quoi que ce soit les objectifs

de monsieur Vladimir Poutine. On ne peut que rester humble devant des évènements

qui nous dépassent, essayer de comprendre, pour le moins rester solidaires

des victimes et de ceux qui souffrent. Le pape François avait demandé, avant

l’invasion, que les chrétiens le jour des Cendres fassent une journée de prière et

de jeûne pour demander la paix. Cette démarche s’impose encore plus maintenant.

Même si nous n’avons pas entre les mains les clefs pour résoudre le conflit nous sommes

concernés, du seul fait que les saints patrons de l’Europe saints Cyrille et Méthode

ont apporté la foi chrétienne au 9e siècle à ces peuples qui deviendront la Russie et l’Ukraine.

Et Vladimir Poutine s’autorise de ce fait pour justifier sa mainmise sur l’Ukraine.

Une utilisation frauduleuse de la religion. Les textes d’Écriture Sainte peuvent-ils nous

aider pour une réflexion qui ne soit pas partisane et tordue.

L’Évangile nous présente Jésus qui enseigne. Son enseignement reste d’actualité.

Qu’as-tu à regarder la paille dans l’œil de ton frère, alors que la poutre qui

est dans ton œil à toi, tu ne la remarques pas ?

L’homme est un être social : il est de fait en relation permanente avec

ses frères et sœurs en humanité. C’est tellement vrai que nous estimons

déjà les conséquences sur nos vies, augmentation des prix, répercussions

négatives possibles des sanctions qui seront prises contre la Russie.

Cette solidarité objective de tous les habitants de notre planète, interroge

notre regard sur nos frères et sœurs. Un regard neutre n’existe pas.

Qu’en est-il du regard que nous portons sur notre entourage, permanent

ou occasionnel, là notre responsabilité est engagée directement.

Sur un simple regard, nous pouvons mettre les autres dans des cases,

leur attribuer des pensées, qui leur sont totalement étrangères, leur prêter

des intentions qui ne les ont jamais effleurés.

Le regard que nous portons sur les autres peut-être totalement à côté de la réalité,

par contre ces regards plus ou moins conscients disent quelque chose de nous-mêmes,

si nous sommes un peu attentifs il nous révèlent à nous-mêmes en vérité.

Jésus nous dit :           L’homme bon tire le bien, du trésor de son cœur, ce qui est bon.

L’homme mauvais, tire le mal de son cœur qui est mauvais.

Je me sens incapable de connaître les secrets du cœur de monsieur Poutine,

mais en ce Carême qui va s’ouvrir cette semaine, c’est bien à moi de me préoccuper

du contenu de mon propre cœur. L’homme parce qu’il est un être social utilise

des mots dans ses relations avec ses semblables. La parole n’est jamais neutre.

Il y a de quoi être en colère sur le fait que monsieur Poutine a mené en

même temps une apparence de dialogue et les préparatifs d’invasion.

La parole peut détruire, décourager, mentir consciemment (voir les falk news)

elle peut aussi heureusement construire, encourager, faire grandir.

La parole peut nous enfermer dans la routine, dans un monde restreint

(voir les reconstructions idéologiques de l’histoire) elle peut aussi nous ouvrir

à l’universel, nous permettre d’accueillir l’humanité des autres dans leur différence.

Le proverbe dit aussi la bouche parle de l’abondance du cœur.

Jésus nous dit             Un bon arbre ne donne pas de fruits pourris ;

Jamais non plus un arbre qui pourrit ne donne de bons fruits.

chaque arbre, en effet, se reconnaît à son fruit :

on ne cueille pas des figues sur des épines ;

on ne vendange pas non plus du raisin sur des ronces.

La première lecture de Ben Sirac le sage nous alerte sur notre usage de la Parole.

Les petits côtés d’un homme apparaissent dans ses propos.

On juge l’homme en le faisant parler. La parole fait connaître les sentiments.

Ne fais pas l’éloge de quelqu’un avant qu’il ait parlé.

N’en restons pas pour autant à un constat, une vision pessimiste de la condition humaine.

  • Parce que Dieu lui-même a un respect infini de l’homme et qu’il veut sa réussite.

Dieu est entré en dialogue avec nous, non pas pour nous tromper ou nous asservir

mais pour nous faire grandir, nous élever même à son niveau divin : parler à quelqu’un

c’est le considérer comme notre égal en quelque chose.

De plus, saint Jean par cette parole audacieuse « Le Verbe s’est fait chair« .

nous dit que Dieu s’implique lui-même en tant que Personne dans notre chair humaine,

dans notre histoire, dans les paroles que nous proclamons lors de nos célébrations,

et même dans nos tentatives limitées de recherche de la vérité, nos tentatives de mettre

des mots sur nos expériences d’hommes et de femmes.

  • Saint Paul de son côté nous assure « cet être périssable que nous sommes
  • deviendra impérissable, cet être mortel que nous sommes revêtira l’immortalité« .

La vie nous est donnée, pour faire la vérité sur nous mêmes, pour accueillir

cette Parole de vie qui est venue jusqu’à nous, Jésus notre Seigneur, et mettre

notre vie au service des autres. L’Évangile nous rappelle :

Le disciple n’est pas au-dessus de son maître ; mais une fois bien formé,

chacun sera comme son maître. Le Carême nous est donnée précisément pour

construire en nous et progresser dans la ressemblance à Jésus Christ,

avec ce conseil de saint Paul . Ainsi, mes frères bien aimés,

soyez fermes, soyez inébranlables, prenez une part toujours plus active à

l’œuvre du Seigneur, car vous savez que, dans le Seigneur, la peine que vous vous

donnez n’est pas perdue.

 

Homélie du 20 février 22 : 7e dimanche du temps ordinaire

Le moins qu’on puisse dire c’est un évangile exigeant.

Au premier contact, on se demande par quel bout le prendre, tellement

ça paraît hors de notre quotidien , hors du raisonnable, et de nos possibilités.

Une remarque peut être éclairante, si la foi chrétienne n’apparaît pas comme

une folie dirait saint Paul, c’est pas la peine d’en parler. Pensez-vous que

Dieu aurait pris le risque de nous envoyer son Fils, si c’était pour être comme tout

le monde, dire et faire ce que nous sommes tous et toutes capables de faire par nous-mêmes.

Jésus aurait-il pris le risque de la passion et de la mort sur la croix, s’il n’y avait pas

derrière tout cela un enjeu d’humanité. Saint Paul présente bien le défi à relever.

Comme Adam est fait d’argile, ainsi les hommes sont faits d’argile.

Il suffit d’ouvrir les yeux pour constater que livré à ses passions et à ses seuls désirs,

l’homme et l’humanité additionnent les erreurs et les catastrophes.

En Jésus Dieu n’a pas d’autre projet que de nous arracher à la catastrophe et à l’insignifiance.

Comme le Christ est du ciel, ainsi les hommes seront du ciel.

Et de même que nous aurons été à l’image de celui qui est fait d’argile, de même

nous serons à l’image de celui qui vient du ciel.

Le défi c’est de vivre dès cette terre selon la logique de Dieu. Ce que dit saint Luc

Vous serez les fils du Très Haut, car lui, il est bon pour les ingrats et les méchants.

Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux.

Ceci admis

comment mettre en œuvre la miséricorde de Dieu dans notre quotidien.

On ne devient pas champion olympique en 24 heures, d’un seul coup,

il faut des années d’entraînement. La reconstruction de notre humanité sur

celle de Jésus, est également l’œuvre de toute une vie, et commence par le plus à notre portée.

L’Évangile reprend un élément de la sagesse des peuples Ce que vous voulez que

les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux.

C’est un minimum, comme les fondations de la maison, qui nous garantit

que nous ne restons pas dans le rêve. C’est déjà une belle réussite d’y parvenir.

L’Évangile donne quelques détails : Ne jugez pas, vous ne serez pas jugés ;

Ne condamnez pas, vous ne serez pas condamnés. Pardonnez, et vous serez pardonnés.

Donnez, et l’on vous donnera.

Qui d’entre nous peut dire en vérité comme le jeune homme riche de l’Évangile,

Tout cela je l’ai fait depuis mon enfance. Je n’oserai pas le dire pour mon compte.

Cela n’empêche pas de chercher à y parvenir. Si l’on pose les fondations d’une maison,

c’est bien dans l’espoir de construire les murs par-dessus.

Jésus ne nous demande pas seulement de nous garder du mal, ce qui est déjà

bien mais de vaincre le mal par le bien, de désarmer la violence, de déceler même

dans le cœur de ceux qui font le mal, la part de lumière qui continue d’exister

en eux-mêmes à leur insu, de voir toujours en eux l’enfant de Dieu en attente de salut.

Jésus nous demande d’opposer la vérité au mensonge. Je vous le dis, à vous qui m’écoutez  :

Aimez vos ennemis, Faîtes du bien à ceux  qui vous haïssent.

Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent.

Je ne pense pas que les exemples concrets donnés par Jésus sont à prendre à la lettre :

À celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre, puisque Jésus ne

l’a pas fait lors de sa passion À celui qui te prend ton manteau, ne refuse pas ta tunique

À qui prend ton bien, ne le réclame pas.

Ces exemples disent clairement ce que doit être notre réaction face au mal.

Il nous faut refuser d’entrer dans la logique mauvaise qui nous est imposée.

À la violence routière ou l’incivilité, il vaut mieux opposer le respect des autres

conducteurs et le respect du code de la route par soucis du bien commun.

Aux informations mensongères, il nous faut opposer la recherche et proclamation

de la vérité, même si cela nous fait passer pour des ringards et oblige à

un vrai travail intellectuel. Jésus recommande également

Priez pour ceux qui vous calomnient.

Il ne suffit pas de vaincre le mal autour de soi, il faut aussi le vaincre en soi-même.

C’est là que la prière est une nécessité, le mal nous dépasse mais il ne dépasse pas Dieu.

Sans lui nous ne pouvons pas le vaincre. Prier pour ceux qui nous font du mal,

c’est déjà anticiper cette substitution du bien au mal.

Ce fut l’attitude de Jésus sur la croix lorsqu’il fit cette prière

« Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’il font. »

L’exemple de David (dans la 1re lecture, le livre de Samuel) est une bonne

illustration d’autant plus pertinente qu’il était loin d’être parfait.

Son exemple peut nous donner de ne pas désespérer de nous-mêmes,

lorsque nous constatons la distance entre ce à quoi nous sommes appelés et

ce que nous réalisons effectivement. En conclusion : Il nous est bon de rappeler

que la foi n’est pas d’abord l’adhésion à un certain nombre de vérités.

La proclamation du Credo chaque dimanche pourrait nous faire identifier :

 » Croire : avec connaissance précise sans erreur  »

Jésus nous a dit : Je suis le chemin, la vérité et la vie. Il n’a pas dit seulement

« Je suis la vérité ». La foi est un cheminement à la suite de Jésus avec

parfois des erreurs de parcours, la foi est un chemin de Vie qui nous remodèle

en profondeur sur l’humanité du Christ, même si nous n’avons pas toujours

les mots exacts pour en rendre compte. Comme le dit encore Saint Paul :

Le Christ est devenu l’être spirituel qui donne la vie.

Ce qui vient d’abord, ce n’est pas le spirituel, mais le physique ;

ensuite seulement vient le spirituel.

Nous avons tout, entre les mains, pour persévérer, redémarrer,

sortir du chemin de traverse, sans nous décourager.

  

Homélie du 13 février 2022 :  6e dimanche du temps ordinaire

Le dimanche dans la proximité de la fête de Notre Dame de Lourdes

est le dimanche de la santé. Lors des vœux du nouvel an, qui ne sont pas loin derrière nous,

beaucoup ont dû terminer par cette expression : « et surtout la santé« .

Avec la Pandémie, la santé fait la Une de l’actualité depuis plus de 2 ans de même

la vieillesse avec le scandale de la maltraitance.

Il y a beaucoup de positif dans cette actualité : la prise en compte de

la faiblesse et de la fragilité est réapparue dans notre société où la performance tenait

le haut de l’affiche. Les Jeux Olympiques sont maintenant doublés par les J

eux Paralympiques. Avant de continuer la réflexion,je voudrais rappeler que Michel Morlet

qui vit maintenant parmi vous, est plus compétent que moi dans ce domaine,

moi qui n’ai pas beaucoup fait vivre les médecins ! En ce temps de campagne électorale

  • Soyons conscients que nous vivons dans un pays qui a mis en place

l’assurance maladie, les indemnités journalières l’allocation handicapés

les structures matérielles et administratives qui permettent de se faire soigner,

hôpitaux, maisons de convalescence, de retraites, industrie pharmaceutique.

Les médecines douces et alternatives fleurissent de toutes part, ouvrant encore

l’éventail des soins disponibles.

  • Nous ne sommes même plus capables d’imaginer un monde sans
  • ces infrastructures sanitaires.

Nous pouvons parfois râler contre la lourdeur et le coût élevé de ces structures

mais qui accepterait de s’en passer ?

  • Nous pouvons au moins admirer tout ce travail qui est fait au service
  • des hommes et des femmes être reconnaissants envers les personnes
  • engagées dans ces filières, depuis les médecins ultra-spécialisés jusqu’aux
  • personnes qui maintiennent la propreté des chambres et des couloirs.

Si les gens n’y pensent pas, chrétiens nous pouvons rendre grâce pour ce monde.

  • Chrétiens nous ne pouvons pas être insensibles à la souffrance des autres
  • ni à notre propre souffrance : Nous ne pouvons pas faire comme si nous étions
  • à l’abri de la maladie, de tout choc psychologique, et même de toute interrogation
  • morale ou spirituelle due à notre condition corporelle marquée par la
  • fragilité et par la mort.
  • En regardant vers Jésus, nous constatons qu’il a guéri de nombreux malades
  • à leur propre demande, ou à la demande de l’entourage, qu’il a expulsé
  • de nombreux démons.

Combien de personnes aujourd’hui ont perdu la maîtrise de leur vie par

les dépendances de toutes sortes ; les drogues, la violence, le plaisir avant tout,

ou simplement aliénés, étrangers à eux-mêmes par le confort et la publicité :

« le prêt à penser ». Jésus s’insurge contre toute dégradation de l’homme,

corporelle ou spirituelle, qui a toujours place dans l’humanité d’aujourd’hui.

  • Comme Jésus, refusant la souffrance autour de lui, nous pouvons aussi être
  • « pris aux entrailles ». C’est un champ infini ouvert à notre sympathie et à
  • notre solidarité. L’encyclique « Tous frères » le rappelle à nous et à notre monde,
  • d’ailleurs les communautés chrétiennes sont présentes

– d’abord par les nombreux chrétiens engagés dans des professions de santé.

– mais aussi dans des associations pastorales ou autres, comme les aumôneries d’hôpitaux

– ou tout simplement par l’attention, les visites des voisins malades ou âgés.

Peut-on faire un lien avec les textes proclamés ce dimanche ?

  • Les béatitudes de Saint Luc peuvent paraître abruptes, exagérées.
  • Elles ont l’avantage de déplacer radicalement nos priorités, de passer :

de l’intérêt porté à la richesse à l’attention aux plus pauvres, à la sobriété

de ceux qui vivent dans l’abondance à ceux qui n’assurent pas leurs besoins

élémentaires de ceux à qui la vie offre toutes les chances à ceux qui peinent

de ceux  qui sont admirés, adulés, à ceux qui sont oubliés, méprisés, rejetés.

  • Jérémie et le psaume nous rappellent qu’aux yeux de Dieu, celui qui se met
  • à l’abri des peines de l’existence ne se préoccupe que de lui-même ressemble
  • à un buisson qui végète sur une terre stérile et salée,

et celui qui s’ouvre aux autres, ne se dérobe pas aux difficultés de l’existence ressemble

à un arbre planté près d’un ruisseau, qui produit du fruit en tout temps.

Ce renversement de perspectives qui peut paraître de la folie pure,

a été vécu par Jésus lui-même :

  • de riche qu’il était, il s’est fait pauvre pour nous enrichir de sa divinité.
  • Il a porté volontairement nos misères corporelles et spirituelles jusqu’à
  • mourir sur la croix pour que la vie l’emporte totalement et définitivement sur la mort.

Selon saint Paul : ce renversement de perspective n’est pas sans lien avec la vie éternelle :

Si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour cette vie seulement,

nous sommes les plus à plaindre des hommes.

La foi en la vie éternelle ne saurait servir à justifier la pauvreté,

la souffrance ou la marginalisation de certains. Cela s’est pratiqué au cours

des temps et ça reste une tentation.

Sans nier l’espérance d’une vie heureuse, la vie présente sera toujours

menacée incertaine, soumise au vieillissement et à la mort : ce n’est pas

endormir notre désir légitime de vivre que de rappeler que ce désir

trouvera totalement son accomplissement dans la vie éternelle et ce

précisément grâce à Jésus ressuscité. Notre vie ne se limite pas à sa

dimension terrestre elle est appelée à une

divinisation au-delà de la mort, raison de plus pour apprécier, respecter,

soigner la vie d’aujourd’hui dans toutes ses facettes.

Et si nos frères et sœurs seront nos compagnons d’éternité, à plus forte

raison il nous faut prendre soin d’eux dès notre vie présente.

Homélie du 6 février : 5e dimanche du temps ordinaire

La mise en œuvre du nouveau missel peut être une occasion de revoir la place

de la liturgie (les différentes cérémonies religieuses) dans notre vie de chrétiens.

Je ne suis pas préoccupé en priorité par les changements, ils sont minimes et

demandent une adaptation, principalement au prêtre.

Les lectures de ce dimanche peuvent éclairer quelques aspects de nos

célébrations, et particulièrement de la messe qui est le lieu où s’exprime,

se rend visible la foi chrétienne. La première réalité qui s’impose

Jésus est l’acteur principal. Comme y insiste l’Évangile.

Si nous prêtons attention : l’énumération n’est pas neutre.

Jésus se tenait au bord du lac il vit 2 barques

Jésus monta dans une des 2 barques

Il demanda à Simon de s’écarter un peu du rivage

il s’assit, il enseignait.

Quand il eut fini de parler, il dit à Simon « avance au large »

enfin Sois sans crainte « désormais ce sont des hommes que tu prendras ».

Toutes les « nouveautés » viennent de Jésus : l’enseignement,

la pêche inespérée et surabondante, le changement de vie pour Simon lui-même

et ses associés Jacques et Jean. Aujourd’hui, puissions-nous, aussi reconnaître

la présence de Jésus au milieu de nous. Sa présence dans la foule des hommes qui

se pressent de toute part dans notre monde. Reconnaître qu’il nous enseigne

par la parole proclamée, notre fréquentation personnelle des Écritures et le partage

de cette parole avec nos frères et sœurs dans la foi, reconnaître qu’il nous donne

un supplément de vie, non par une pêche miraculeuse mais en nous donnant

son humanité et sa vie lors du partage du pain et du vin en mémoire de lui,

et en nous envoyant vers nos frères et sœurs pour leur dire ce don de Dieu offert à tous.

L’action principale de Jésus serait sans effet, sans l’accueil de notre part.

Cela commence par l’accueil de l’enseignement. La foule est très attentive,

au point de presser Jésus de toute part et d’obliger Jésus à emprunter la barque de Simon.

Simon accepte d’abord de mettre sa barque à disposition de Jésus,

puis de reprendre la pêche après l’échec de la nuit :

 » Maître nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre, mais sur

ta parole je vais jeter les filets « . Enfin les 3 disciples nommés ici,

ramènent leur barque au rivage et laissant tout ils le suivirent.

Remarquons que l’accueil est progressif.

Au départ, Jésus n’est pas nommé par les futurs disciples.

Ils rendent service à ce « quasi inconnu » qui se présente à eux.

Ils écoutent avec la foule son enseignement.

Quand Jésus leur dit « Avance au large » Simon répond

« Maître », après la pêche, Simon Pierre tombe à genoux, se prosterne et le nomme  Seigneur.

C’est seulement après cette expérience et progression de la foi qu’il

peut tout laisser et suivre Jésus. Le récit évangélique situe cette évolution

en quelques heures seulement, nous savons par expérience,

qu’il faut remettre sans cesse l’ouvrage sur le métier, et qu’il nous faut

des années et des années pour passer du statut de curieux à disciple récréé,

remodelé par Jésus ajusté à Jésus. Première conclusion. Soyons aussi patients

avec nous-mêmes que Dieu l’est avec nous. C’est bien pourquoi il

nous invite chaque dimanche à nous retrouver avec lui et que chaque

année nous revivons depuis l’attente de sa venue avec l’Avent,

sa venue parmi nous à Noël, sa victoire sur la mort et le mal

par les fêtes pascales et l’attente de son retour par le temps ordinaire.

Saint Paul ne dit pas autre chose aux chrétiens de Corinthe.

Je vous rappelle la Bonne Nouvelle que je vous ai annoncée ;

Cet Évangile vous l’avez reçu. C’est en lui que vous tenez bon.

C’est par lui que vous serez sauvés, si vous le gardez.

Il n’oublie pas qu’il est lui-même le premier accueillant :

Ce que je suis (moi qui ai persécuté l’Église de Dieu)

, je le suis par la grâce de Dieu, et sa grâce, venant en moi, n’a pas été stérile.

Jésus enseignait longuement. Saint Paul dit :

« Avant tout je vous ai transmis ce que j’ai moi-même reçu

 » nous sommes des « recevants », des « héritiers », des « écoutants »,

mais non pas des « recevants » passifs. Il nous faut reprendre avec nos

mots d’aujourd’hui l’enseignement de Jésus. Un problème concret.

Le mot « Consubstantiel » réintroduit dans le symbole de Nicée-

Constantinople. Et le mot  « transsubstantiation »  pour parler

du pain et du vin consacrés. Ne faisons pas une fixation sur des

mots élaborés dans un contexte qui n’est plus le nôtre.

Réjouissons-nous pour ceux et celles qui sont à l’aise avec .

Mais nous ne sommes pas attachés à des mots

(même s’ils sont utiles à certains moments !)

mais soyons attachés à la personne de Jésus qui

est le visage authentique de Dieu le Père.
Saint Paul avait cette liberté, la lettre aux Corinthiens nous

transmet sous sa plume le plus ancien credo de l’Église primitive.

Le Christ est mort pour nous, ; conformément aux Écritures,

et il fut mis au tombeau .Il est ressuscité le troisième jour

conformément aux Écritures

Il est apparu à Pierre, puis aux douze, ensuite il est apparu à plus

de cinq cents frères à la fois ensuite il est apparu à Jacques,

puis à tous les apôtresEn tout dernier lieu, il est même apparu

à l’avorton que je suis.

Gardons à la fois, cette liberté de dire avec des mots imparfaits la foi qui nous habite.

Et cherchons à la fois, des mots qui soient compréhensibles pour nous et nos

contemporains, pour qu’ils aient eux aussi accès au trésor que Dieu offre

aux hommes en la personne de Jésus Christ.

Je m’y essaie chaque semaine en travaillant sérieusement

le contenu et la forme des homélies. Vous le faîtes de votre côté

en préparant les messes, avec le mot d’accueil, les prières universelles,

et aussi le choix des chants qui peuvent être de véritables professions

de foi qui vont nous courir dans la tête toute la semaine, et nous nourrir.

C’est dans cet esprit que je vous ai suggéré comme effort de Carême,

que les lecteurs soient désignés d’avance et qu’ils osent en quelques

mots dire l’incidence de ce texte, sur leur vie, quelle lumière

ils suscitent en eux, quelle lumière ils projettent sur notre monde,

sur les évènements que nous vivons. Ceci sans vous enfermer dans

un cadre contraignant, et dans le respect de votre liberté !

 

Homélie du 30 janvier 2022 :  4e dimanche du temps ordinaire

En cette période, le mot fraternité fait partie de l’actualité.

La perspective des élections présidentielles peut donner une image du contraire,

quoi qu’il en soit c’est un enjeu majeur pour notre pays.

Le synode, auquel nous sommes invités à participer, serait voué à l’échec

s’il ne se déroule pas dans une démarche de confiance mutuelle, d’amitié véritable.

Les restrictions de rencontres dues à la pandémie sont ressenties plus ou moins

durement en raison des réunions familiales ou amicales qui sont ajournées ou limitées.

En fait le mot aimer/amour fait partie de notre quotidien le plus banal.

C’est pourquoi le texte de saint Paul, souvent appelé « l’hymne à l’amour » est le bienvenu.

Les candidats, candidates au ministère religieux ne s’y trompent pas,

ils choisissent très souvent ce texte pour leur cérémonie. Ensuite tout le défi

c’est de le mettre en pratique. Ce défi nous concerne tous.

Si l’on est un tout petit peu conscient et de l’utilisation quotidienne

du mot aimer/amour et de ce qui se passe dans le secret de notre cœur pour chacun,

chacune de nous, il faut bien reconnaître que ces 2 mots peuvent être utilisés

à toutes les sauces et se prêter à des interprétations bien différentes.

Saint Paul commence par nous dire : « Ne prenez pas des vessies pour des lanternes« .

Il commence par une mise en garde qui concerne nos paroles, un outil que nous

utilisons sans cesse dans nos relations interpersonnelles, notre comportement religieux

nos actions de solidarité particulièrement.

  • De fait : je peux avoir accumulé de multiples connaissances, avoir une parole brillante,
  • chaleureuse. Elle peut être mise au service de mes seuls intérêts, de ma promotion,
  • de ma propre gloire, elle peut même devenir mensongère et servir
  • à « rouler les autres dans la farine« .

Saint Paul conclut. Une parole qui n’est pas au service de l’Amour véritable, c’est du vide,

c’est du bruit pour rien.

  • Je peux tout savoir sur la religion, sur la Bible, citer Dieu à tout bout
  • de champ remuer ciel et terre en son nom. Si ma vie religieuse n’est pas
  • une réponse d’amour à un amour qui me précède, cela risque fort de
  • relever de l’idéologie. Nous connaissons les ravages que ça peut faire.

Saint Paul conclut : une religion qui n’est pas animée de l’intérieur par l’amour

ne sert à rien, pire même elle peut être une servitude pour l’intéressé et pour les autres.

  • Même la solidarité, l’action en faveur des autres peut être dévoyée,
  • créer de la dépendance. Asservir au lieu de libérer : seul l’amour authentique
  • des personnes rencontrées en fait une action positive.

Le mot aimer/amour peut cacher son contraire qui sont l’égoïsme, la manipulation.

C’est bien ce mot qui a été employé par les pédocriminels pour neutraliser la défense des victimes.

Dans notre société du paraître, il peut aussi être mis au service de la séduction.

Saint Paul n’en reste pas au côté négatif, à une mise en garde qui n’est pourtant pas inutile.

Il nous donne des critères de vérification, accessibles à tous, il me semble.

L’amour prend patience, il ne se vante pas.

Il ne s’emporte pas, n’entretient pas de rancune.

Il trouve sa joie dans ce qui est vrai.

Il espère tout.

Je ne vais pas les redire tous, ils sont sans cesse disponibles.

Est-ce que nous les utilisons, dans ce que nous appelions autrefois

« l’examen de conscience ». Personne homme ou femme, adulte ou enfant ne

peut vivre son humanité, progresser en humanité s’il ne s’arrête pas de temps

à autre pour évaluer ses comportements personnels pour évaluer ce qui

l’inspire réellement, sur la cohérence entre ses désirs son idéal même, et

sa manière de vivre effective. Ces critères seraient les bienvenus dans une révision

de vie en groupe, avec son conjoint.

Il ne faudrait pas pour autant adopter une position puriste.

L’amour ne passera jamais dit saint Paul, mais nous restons des êtres fragiles.

Nos connaissances sont partielles : plus ça vient, et plus nous réalisons notre ignorance.

Notre pratique religieuse est limitée : quelle que soit notre générosité Dieu nous échappe.

Notre ouverture aux autres : nous avons aussi besoin d’être nous-mêmes considérés,

respectés, aidés. Même au niveau moral nous restons fragiles. Saint Paul a l’honnêteté

et le courage de dire dans la lettre aux Romains (7. 18-19)

 » Vouloir le bien est à ma portée, mais non pas l’accomplir, le bien que je veux,

je ne le fais pas, et le mal que je ne veux pas, je le fais.

Notre amour est fragile. Cela ne doit pas nous accabler, mais nous rendre

humbles pauvres de cœur, une condition essentielle pour aimer.

Mais de même qu’un enfant, nous dit saint Paul, est appelé à grandir et à ne

pas s’enfermer dans des comportements enfantins, nous sommes appelés

à grandir dans l’amour. D’autant plus que l’amour ne passera jamais.

Nous croyons que la vie éternelle, c’est l’amour porté à l’infini, offert gratuitement

par Dieu et accepté sans réserve par la créature, au point d’être transfigurés,

vivants comme Jésus ressuscité. Ce serait dramatique pour nous de ne pas

nous investir au maximum dans ce temps d’apprentissage de l’amour qui est notre vie terrestre.

 

 Homélie du 23 janvier 2022 : 3e dimanche du temps ordinaire

Le 3e dimanche du temps ordinaire a été déclaré par le pape François

dimanche de la Parole de Dieu. Ça complète admirablement la semaine de prière

pour l’unité des chrétiens, où le point commun entre toutes confessions, Catholiques,

Orthodoxes, Protestants est la référence commune à la parole de Dieu.

Sans oublier nos frères aînés les Juifs avec qui nous avons en commun l’Ancien Testament.
L’expression Parole de Dieu nous paraît naturelle : lors des baptêmes qui regroupent

bien des gens en distance avec une démarche religieuse, je leur pose la question .

 » Est-ce que vous avez déjà entendu Dieu vous parler ?  » la réponse est toujours  non !

Cette démarche qui nécessiterait une longue explication, a pour le moins le mérite

d’établir entre eux et moi une égalité de situation. Car moi non plus je n’ai pas entendu

de voix venant directement du ciel.

Il me semble nécessaire de s’arrêter d’abord au mot Parole.

L’être humain est cet être vivant original qui parle, une langue que nous ont transmise

nos parents, en cela nous sommes des héritiers.

C’est un précieux outil de communication, que les autres animaux possèdent aussi

mais plus précieux encore. La parole va permettre de mettre des mots sur notre

expérience de vie, de donner du sens à ce que nous vivons, et d’avoir des relations

de gratuité avec nos semblables, d’avoir des échanges sans limite. Il y a un lien

profond entre la parole et l’amour. Car la parole est sortie de soi pour aller vers l’autre.

(là il y a une différence fondamentale avec les animaux).

La parole suppose la parole bien sûr mais aussi l’écoute et le silence faute de quoi

on tomberait dans le bruit inutile ou accablant.

Nous sommes des héritiers, sans quoi on ne pourrait se comprendre de l’un à l’autre

mais il faut aussi devenir des inventeurs, qui utilisent la parole commune pour dire

leur expérience originale de vie. De ce fait ils la modifient en infléchissant le sens des mots,

en en rajoutant des nouveaux. Une langue qui n’évolue pas devient une langue morte.

Nous ne disons pas seulement Parole, mais Parole de Dieu.

En disant cela nous entrons dans la foi, mais une foi ouverte à une expérience originale :

Au cours de son histoire l’homme s’est découvert acteur dans un monde qui le précède,

qu’il habite, et le dépasse. Il s’est mis à l’écoute de son propre cœur dans le silence,

à l’écoute des autres par le dialogue, à l’écoute du monde par l’admiration.

Il s’est risqué à nommer ce qui le dépassait. Les équivalents du mot DIEU sont apparus,

il est devenu croyant, présentant une présence dans toutes ses découvertes

se reconnaissant écouté, guidé, éclairé, aidé depuis un ailleurs qu’il ne maîtrise pas.

Il a partagé cette expérience avec ses semblables qui se sont reconnus également

dans cette expérience spirituelle, que nous nommons la transcendance.

Croyants d’aujourd’hui, nous héritons de l’expérience de nos prédécesseurs,

comme chrétiens nous sommes héritiers de l’expérience du peuple juif qui nous

l’a transmise par les écrits de l’Ancien Testament. Ce qui est merveilleux :

Aujourd’hui, grâce aux travaux d’ethnologues, il est aussi possible d’évaluer

ce que les Juifs donc l’écrit de l’Ancien Testament ont reçu de toutes les religions

des peuples « païens ». Ce qui nous fait également héritiers de toutes ces civilisations.

Saint Paul fera aussi le rapprochement dans son discours d’Athènes.

L’évangile choisi pour ce dimanche montre bien que saint Luc s’est comporté en héritier :

 » J’ai décidé moi aussi, après avoir recueilli avec précision des informations

concernant tout ce qui s’est passé depuis le début, d’écrire pour toi,

excellent Théophile, un exposé suivi « .

Jésus lui-même dans le discours inaugural de son ministère à Nazareth reçoit

le livre du prophète Isaïe.
Il se laisse d’abord imprégner par la parole du prophète qui le précède où

il reconnaît son rôle et son être même d’envoyé de Dieu dans sa relation à Dieu son Père.

L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction.

Il m’a envoyé porter la Bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération,

et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés,

annoncer une année favorable accordée par le Seigneur.

Le plus extraordinaire est dans la conclusion que tire Jésus lui-même.

Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre.

Jésus se présente comme une parole vivante et qui fait vivre, non seulement

par la qualité de ses paroles, mais aussi par ses actes qui authentifient ses paroles,

au point que saint Jean osera dire :

Le Verbe (la parole) s’est fait chair et il a habité parmi nous.

Jésus se présente comme auditeur assidu de Dieu son Père qui

lui donne autorité aussi bien dans ses paroles que par ses actes.

Notre statut de chrétiens est un statut original.

Pour nous la parole de Dieu est donc une parole qui a pris chair dans

un homme bien situé dans l’histoire. Ce n’est pas une illusion, l’expression

de nos seuls désirs. Elle demande aussi de prendre corps dans notre cœur dans notre vie,

pour nous rendre nous-mêmes vivants, pour nous rendre libres,

pour éclairer notre chemin, nous consoler dans nos peines, pour habiter nos joies,

interpeller nos habitudes et nos réalisations. Elle doit être partagée avec les autres croyants,

pour atteindre sa pleine dimension et ne pas être accommodée, remodelée par

nos propres désirs conscients ou inconscients, et rester ainsi une Parole qui vient d’ailleurs,

et nous dépasse. Elle doit être interprétée , réactualisée en communauté pour relever

les défis que  l’évolution du monde nous demande d’éclairer et relever.

Elle doit être proposée à ceux qui l’ignorent encore, ou la considèrent obsolète,

dépassée, par la cohérence entre ce que nous sommes, ce que nous vivons et

la Parole que nous avons reçue. Faute de quoi la Parole de Dieu deviendrait une langue morte.

 

 Homélie du 16 janvier 2022 : 2éme  dimanche du temps ordinaire

Il est question d’une noce, et quelle noce !

Commençons par nous mettre à l’écoute du prophète Isaïe.

C’est Dieu qui parle : « On ne te dira plus : « délaissée ! »

À ton pays, nul ne dira « désolation ! ».

 » Tu seras appelée « Ma Préférence », cette terre se nommera « l’Épousée ».

Car le Seigneur t’a préférée et cette terre deviendra « l’Épousée ».

Comme un jeune homme épouse une vierge, ton Bâtisseur t’épousera.

Comme la jeune mariée fait la joie de son mari, tu seras la joie de ton Dieu. »

Tout l’effort de la 1re alliance aura été de passer d’un Dieu tout puissant, inaccessible,

voir capricieux et arbitraire, envers qui il faut remplir toutes les obligations en tremblant.

À un Dieu qui n’est qu’amour, à la fois amour offert gratuitement et sans réserve,

mais un amour qui attend une réponse d’amour.

Placé au début de l’Évangile de Saint Jean ce récit des noces de

Cana est probablement plus que le récit d’un fait divers. En témoignent

les premiers mots du récit (omis dans le lectionnaire)

 » le 3e jour, il y eut des noces à Cana de Galilée. »

Le 3e jour est une allusion à la mort et résurrection de Jésus.

D’ailleurs il n’est pas question de la mariée, et le mari n’est évoqué que

pour une chose où il n’est pour rien. Le fait d’offrir le meilleur vin en dernier.

Vous en savez plus long que moi sur le mariage.

Chaque fois qu’un nouveau couple se reconnaît et se forme, les intéressés

expriment souvent « C’est seulement avec cet amour que nous avons

commencé à exister sérieusement et joyeusement. »

C’est avec cet amour que nous avons commencé à croire en la vie et à

prendre le futur à bras le corps, en donnant la vie à des enfants, mais aussi

en s’engageant pour construire un monde plus humain. Et nous avons préssenti

que notre amour recelait une parcelle d’Éternité pour nous et pour ceux qu’on aime.

En même temps, nous savons bien que l’amour conjugal ne tient pas toujours

ses promesses ; il peut se détériorer ; se briser même, du fait des conjoints

mais aussi du fait d’évènements extérieurs.

La noce de Cana doit bien nous éclairer sur ce mariage entre Dieu et l’humanité :

elle se passe en Galilée, la région où Jésus a vécu, grandi, travaillé en solidarité avec

ses frères et sœurs en humanité. Jean Baptiste a proclamé qu’il n’était pas lui-même le Messie.

Et il a désigné Jésus comme  » l’Élu de Dieu », l’élu a quelque chose à voir avec le mariage.

Jésus a commencé à rassembler des disciples André et Jean, Simon-Pierre,

Philippe et Nathanaël, tous galiléens. La question se pose précisément,

peut-on faire confiance à cet homme dont on commence à parler,

et qui pourtant est fort différent dans ses comportements de ce

qu’on attend du Messie. Il se met au rang des pécheurs en recevant

le baptême de pénitence des mains de Jean Baptiste. Les premiers

disciples sont des travailleurs manuels, lui-même n’a fréquenté aucun

maître prestigieux qui pourrait authentifier sa parole.

Il n’appartient pas aux milieux dirigeants.

Les noces de Cana vont précisément lever le doute.

 » Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit.

C’était à Cana en Galilée. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui. »

À cette noce c’est Marie qui est nommée la première.

« Elle était là » laissant entendre qu’elle ne pouvait pas ne pas y être.

Jésus est seulement invité.

C’est Marie qui remarque que le vin vient à manquer, elle parle naturellement,

et avec autorité aux serviteurs. Tout ceci indique que Marie est

un élément actif de l’évènement. Comme à Cana avant la noce, active dans la gestion de la fête.

Lorsque Marie dit à Jésus, ils n’ont plus de vin, Jésus dans sa réponse lui dit « FEMME »

elle a donc un autre rôle que celui de mère.

Marie héritière de toute l’histoire d’Israël, ayant écouté la Parole de Dieu

au point de répondre à l’ange « Je suis la servante du Seigneur » est le point

d’aboutissement de la 1re alliance et elle fait ce constat d’un échec, ou

d’un manque grave « ils n’ont plus de vin« . Ce mariage entre Dieu et l’humanité

n’a pas tenu ses promesses, les jarres nécessaires aux purifications des Juifs,

geste qui permet d’accéder à Dieu sont vides.

Elle fait remarquer à Jésus que c’est à lui d’agir et de sortir de cette situation

sans issue pour l’humanité. Jésus va entrer en action.

Il donne l’ordre « Remplissez d’eau les jarres. » Ce que firent les serviteurs en précisant

 » jusqu’à ras bord « , une abondance impensable autour de 600 litres.

Et c’est cette eau de purification, qui va devenir le support de la vie et de la joie

de l’Évangile, tout simplement parce que Jésus a porté à son achèvement

l’Alliance héritée de son peuple. Cela sera effectif lorsque le 3e jour Jésus

sortira du tombeau après avoir épousé l’humanité entière dans la douleur

de sa mort sur la croix. Nous pouvons encore remarquer la discrétion extrême

de l’action de Jésus. Personne ne semble avoir vu que le vin a manqué.

Seul le maître du repas fait remarquer au marié qu’il n’a pas suivi la coutume

et qu’il a innové en donnant le meilleur vin pour finir.

Et seuls les disciples invités aussi avec Jésus, « ont vu sa gloire et ont cru en lui « .

Il aurait fallu des heures pour un commentaire sérieux de cet Évangile.

Il peut nous enseigner pour le moins, à nous qui croyons et témoignons

dans un monde où les jarres sont souvent vides.

N’hésitons pas à montrer aux gens tout ce qui leur a été transmis par

la venue de Jésus, donnons-leur des jarres à remplir jusqu’au bord,

et invitons-les à boire cette eau qui dans leur bouche deviendra un vin excellent.

Ne nous décourageons pas, si l’action de Dieu passe inaperçue aux yeux de beaucoup,

continuons avec persévérance à faire tout ce qu’il nous dira.

 

Homélie du9 janvier 2022 : Baptême de Jésus

Le peuple venu auprès de Jean le Baptiste était en attente,
et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Christ.

Aujourd’hui encore nous sommes en attente, même si cela reste dans

le secret de notre cœur. Nous attendons la sortie de l’épidémie, nous attendons

de retrouver une vite dite normale, nous attendons en ces temps gris de revoir le soleil,

nous attendons un nouveau président ou une nouvelle présidente.

Au-delà d’attentes immédiates, nous avons, je dirais des « grandes attentes

 » à la ressemblance des Juifs qui attendaient le Messie.

Nous sommes partie prenante de l’attente d’une société plus juste,

attentive aux plus pauvres, aux malades et aux isolés, non polluante, réconciliée.

Des femmes, des familles attendent la naissance d’un enfant.

Nous attendons d’être reconnus dans notre originalité.

L’attente nous mobilise, nous dynamise, elle nous qualifie dans notre humanité :

Personne en ce temps de vœux ne souhaite du mal à ses destinataires

(même à ses ennemis), par contre si nous disons ou entendons

« Je n’attends plus rien de la vie » nous réalisons tout de suite qu’il y a un ressort de cassé.

L’attente si elle est sérieuse, oblige à un engagement.

L’Évangile précise : tout le peuple se faisait baptiser.

Si on attend sérieusement que le futur président soit à la hauteur des défis à relever,

je me dois d’aller voter.

Et si je veux réellement qu’on sorte de la pandémie, je dois prendre

ma part des mesures de protections.

Si je souhaite un monde sans nuisances, je dois revoir le contenu de ma poubelle.

Et si je tiens à vivre dans un monde plus fraternel, je me dois d’apaiser

les tensions autour de moi, plutôt que de mettre de l’huile sur le feu.

Pratiquement toutes les interventions publiques du Pape vont dans ce sens,

aussi bien ses grands textes, sur la maison commune, la famille, la fraternité,

que ses catéchèses du mercredi.

Ne serait-ce pas la raison d’être du synode, pour ceux et celles qui attendent

une église plus fidèle à Jésus Christ.

L’attente a une dimension collective. Je rappelle que synode signifie « marcher ensemble »

aucun des objectifs mobilisateurs ne peut être atteint tout seul.

On n’imagine pas un président élu avec une seule voix, et en dehors du vote

je peux parler avec l’un ou l’autre, écouter des opinions différentes pour y voir un peu plus clair.

Il est souhaitable qu’une femme ne soit pas seule pour attendre la naissance de son enfant.

Le premier à l’accompagner c’est bien sûr le père, mais il faut aussi la participation

de toute la société pour préparer l’accueil de l’enfant.

Par définition, le monde associatif existe à partir de cette conviction,

qu’il faut être ensemble pour réaliser un objectif souhaitable.

L’attente demande de se mettre au clair avec soi-même, de se mettre en vérité.

Ce que fait Jean Baptiste. « Moi, je vous baptise avec de l’eau ; mais il vient,

celui qui est plus fort que moi. Je ne suis pas digne de dénouer

la courroie de ses sandales« .

On n’imagine même pas ce qui serait advenu si Jean Baptiste avait

accepté de prendre la place de Jésus ; Mais on comprend très vite

quand quelqu’un prend une responsabilité si c’est pour servir, ou

si c’est pour son intérêt ou pour sa gloire.

Jésus a épousé les attentes de son peuple en se faisant baptiser lui aussi.

Ce faisant il légitime les attentes des hommes, mais il va en faire évoluer le contenu.

Jésus se met au rang des pécheurs, alors que son peuple attendait

un messie victorieux qui chasserait l’envahisseur et tous les malfaisants.

Ceux qui étaient désignés comme « pécheurs ». Saint Paul osera dire :

« Il s’est fait péché pour nous. »

Il n’est pas le Dieu attendu qui dans une manifestation glorieuse et puissante,

sépare les bons et les mauvais. Il est ce Dieu humble qui veut le salut de tous les hommes.

Jésus est bien celui qui prend au sérieux l’attente des hommes

mais en se donnant lui-même afin de nous racheter de toutes nos fautes,

de nous purifier pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à faire le bien.

Le baptême de Jésus est dans la ligne de sa naissance dans une étable,

mais encore plus annonce la mort sur la croix. Dieu voit plus loin que nous,

le plus souvent nous avons une espérance à court terme :

Il n’est pas mauvais d’espérer la réussite d’un examen, d’espérer décrocher un CDI,

ni même la victoire de son candidat préféré.

Mais après avoir obtenus tout cela, nous restons désespérément les mêmes,

avec nos limites et de nouvelles attentes.

Jésus se fait solidaire de nos luttes pour grandir en humanité,

avec nos frères et sœurs en humanité, il révèle et réveille nos forces cachées ou endormies.

La grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes.

Elle nous apprend à renoncer à l’impiété et aux convoitises de ce monde,

et à vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et

piété, attendant que se réalise la bienheureuse espérance.

Jésus sauve notre vie présente de la banalité, et des attentes toujours déçues.

Jésus sauve notre vie présente, en nous garantissant et en nous appelant à la vie éternelle.

Quelle pourrait-être la valeur de nos attentes, de nos engagements, si notre perspective

finale était le retour au néant ? Tout cela ne serait au final qu’une agitation inutile,

à la limite une sinistre plaisanterie (ce que disent les philosophes existentialistes !)

En guérissant des malades, en chassant les démons, en rappelant à la vie des morts prématurés,

Jésus nous dit que Dieu est le Dieu de la vie, en sortant vivant et glorieux du tombeau,

Jésus nous garantit que notre vie est définitive, que le mal est réellement vaincu,

et définitivement. Nos attentes ne seront pas déçues.

Ce que saint Paul rappelle à Tite : « Par le baptême (celui de Jésus et le nôtre)

il nous a fait renaître et nous a renouvelés dans l’Esprit Saint.

Cet Esprit Dieu l’a répandu sur nous en abondance, par Jésus Christ notre Sauveur,

afin que rendus justes par sa grâce, nous devenions en espérance héritiers de la vie éternelle. »

Pour résumer Dieu nous dit à chacun, chacune de nous : comme à Jésus :

« Toi, tu es mon Fils bien-aimé : en toi, je trouve ma joie. »

Si nous accueillons cette parole, toutes nos attentes sont comblées à l’infini.